Des OGM et des hommes

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Par Johanne Dion


 

Au fil des années, autour de chez moi, j’ai vu disparaître les champs de pommes de terre, de fraises, de graminées et les  pâturages au profit de champs n’accueillant que les monocultures de maïs-grain et de soya. Mais plus le temps passe, plus je m’inquiète.
 
Quand j’étais enfant, dans le jardin de chez ma mère, à Richelieu, les abeilles étaient beaucoup plus nombreuses à butiner les fleurs. Il y a environ 15 ans, je pouvais admirer à toutes les 30 secondes un papillon Monarque en migration vers le Mexique, s’arrêtant dans mes plates-bandes fleuries pour se rassasier avant de continuer à l’automne son périple vers le sud. Aujourd’hui, ayant atteint l’âge adulte, je constate que la vie a totalement changé dans ce même jardin. Maintenant, l’observation d’un Monarque en migration devient un évènement à noter dans mon carnet. Les guêpes et les thons sont beaucoup plus nombreux que les abeilles: certains étés, les abeilles sont totalement absentes.


Me questionnant sur la cause de la disparition graduelle de ces deux insectes remarquables, je pensais aux monocultures. Je me mets à la place des abeilles et des papillons : où trouver de quoi se nourrir en attendant la floraison du maïs? Sans  diversité de sources de pollen, les insectes qui participent à la chaîne de reproduction des plantes sont affamés et chassés des territoires qui en ont besoin.


De plus, quoi penser des applications généreuses de pesticides? Et du maïs génétiquement modifié avec le Bacillus thuringiensis qui ne tue que la chenille qui s’attaque à l’épi, nous assure-t-on? 


Le maïs Bt, il faut comprendre, n’est pas issu d’un croisement hybride sexué entre deux sortes de blé d’inde. Par exemple, les petits pois de Mendel, car c’est Mendel qui a découvert le mécanisme des hybrides, les petits pois de Mendel, dis-je, ont un pourcentage de pois roses quand on croise des pois à fleurs rouges et des pois à fleurs blanches. Par contre, pour les OGM, l’homme en laboratoire a changé la structure de la plante au niveau de ses gènes, de l’ADN, de sorte que toutes les parties du plant de maïs Bt contiennent la capacité de tuer. Et d’affamer les autres espèces de la nature.

Je lis maintenant dans un article du Devoir, écrit par Louis-Gilles Francoeur (édition du vendredi 19 octobre 2007, « Des OGM au fil du courant »), qu’une étude réalisée par une équipe de chercheurs de trois universités des États-Unis a dévoilé un autre danger insoupçonné du maïs Bt: le pollen de cette plante modifiée voyage via le vent et la pluie vers les fossés et les cours d’eau qui drainent les champs, s’accumule dans les sédiments et est bouffé par les micro-organismes du fond de l’eau. Les effets: certains de ces micro-organismes croissent moins bien, d’autres ont plus de difficulté à se reproduire, et d’autres en meurrent. Or, les micro-organismes sont à la base de la chaîne alimentaire qui ultimement nourrit les humains!

Sans en comprendre toute la portée, nous minons les bases du vivant depuis des décennies. Par ignorance ou par cupidité, ou les deux?

 
 


Par Johanne Dion

Native de la ville de Richelieu, Johanne Dion milite activement pour l’assainissement de la rivière Richelieu depuis 1985. Ses nombreux écrits et lettres d’opinions sur les questions environnementales ont été publiés dans divers journaux et revues. Co-fondatrice du Comité Richelois pour une Meilleure Qualité de Vie (CRMQV) en 2005, elle est aussi bénévole pour le groupe Conservation de la Nature, où elle milite pour la protection des frayères du chevalier cuivré. Elle a aussi participé à des travaux de restauration des berges de la rivière Richelieu avec Conservation de la Nature et Covabar à l’été 2006.

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