Climat : l’heure des choix

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La conférence de Bali, qui se tiendra du 3 au 14 décembre, sera cruciale. Car elle présidera à ce qui devra être fait quand les accords de Kyoto prendront fin en 2012.

 

Ce texte est extrait d’un article à paraître dans le cadre d’un dossier sur la crise écologique qui sera publié dans le numéro de décembre de la revue Relations.

 

Par Jean-Guy Vaillancourt
Sociologue



La surconsommation accrue des énergies fossiles non renouvelables (pétrole, gaz naturel, etc.) provoque le réchauffement global accéléré des températures terrestres. Il s’agit-là d’un phénomène très menaçant pour les humains – en particulier les plus défavorisés de la planète. Le Groupe intergouvernemental d’experts sur les changements climatiques (GIEC), étudient ce phénomène complexe depuis deux décennies. […] Ses 2500 scientifiques en sont arrivés à cerner avec une précision croissante les caractéristiques, les facteurs et les impacts du réchauffement climatique. Parce que ce phénomène représente autant de sources potentielles de conflits sociaux et de guerres, le GIEC a remporté le prix Nobel de la Paix 2007, avec Al Gore.


Causé principalement par l’augmentation des gaz à effet de serre (GES) émis par les activités humaines, […] le réchauffement entraîne la fonte des glaces de l’Arctique et de l’Antarctique – une surface aussi grande que la Californie est en train d’y fondre. Le GIEC y annonce une hausse minimale du niveau des océans de 28 cm d’ici l’an 2100 […]. On estime ainsi que d’ici l’année 2080, chaque année, environ 100 millions de personnes seront affectées par des inondations dues à cette hausse, particulièrement sur les territoires côtiers et les îles des océans Indien et Pacifique. Cela pourrait même affecter l’Île du Prince-Édouard et les Îles de la Madeleine. À l’inverse, on prévoit une pénurie d’eau susceptible d’affecter de 1,1 à 3,2 milliards d’êtres humains d’ici 2080 et qui frappera surtout l’Afrique qui manque déjà de précipitations et de réserves d’eau. La désertification, la déforestation ainsi que des bouleversements dans l’agriculture et les pêcheries accompagnent aussi le réchauffement climatique. […]


Une question de justice

Cet emballement climatique révèle un sérieux problème de justice sociale et d’équité internationale puisque c’est nous, les sociétés occidentales, qui surconsommons les énergies fossiles. Per capita, le Canada et les États-Unis sont actuellement bien plus responsables que les pays du Sud, qui sont déjà et seront pourtant bien plus affectés.

Mais le Nord aussi sera touché. La Californie vient d’ailleurs de terminer une saison des pluies avec cinq fois moins de précipitations que la moyenne habituelle, et cette année est la plus sèche depuis 130 ans. […] Pendant ce temps, les gouvernements de George Bush aux États-Unis, Stephen Harper au Canada et John Howard en Australie font tout pour éviter les vraies solutions. Le système économique, industriel et commercial qui a conduit à ce résultat doit pourtant être modifié et remis en cause. Il faut de toute urgence réduire les GES –ce pourquoi le Protocole de Kyoto a été mis sur pied–, et miser sur les économies d’énergie, l’énergie solaire, la reforestation, les transports en commun, etc. […]

Le Canada et le Québec

L’an dernier, à Bonn, la phase I de Kyoto (2008-2012) fut lancée – surtout grâce aux pays du Sud qui seront les plus touchés et qui veulent des réductions des GES de plus en plus substantielles et contraignantes. La position du Canada est particulièrement scandaleuse, car c’est le seul pays signataire qui refuse encore de faire un effort pour atteindre ses objectifs […]. De l’aveu même du premier ministre Stephen Harper, le Canada s’achemine plutôt vers une hausse des émissions de 50 % au-dessus des cibles de Kyoto pour 2012, surtout parce que celui-ci ne veut pas déplaire à l’Alberta et aux entreprises qui y empochent des superprofits. Non seulement cette approche est-elle une honte car Harper est maintenant, avec Bush et Howard, un des trois leaders mondiaux les plus farouchement anti-Kyoto, mais, de surcroît, son gouvernement est dans l’illégalité car il ne respecte pas la Loi de mise en œuvre du Protocole de Kyoto, entrée en vigueur le 22 juin 2007.

Que fait pour sa part le gouvernement Charest? Il n’est pas beaucoup mieux que l’ADQ de Mario Dumont qui n’a convaincu personne avec son récent virage vert. Malgré ses belles paroles et quelques petits gestes symboliques, le gouvernement libéral fait reculer le Québec sur la question des changements climatiques en optant pour l’autoroute 25 et pour les ports méthaniers de Gros-Cacouna et de Rabaska. Il faut rappeler qu’un seul de ces projets favorisant la filière gazière annule dans leur totalité les réductions d’émissions de GES consenties récemment par les alumineries québécoises, soit le secteur industriel contribuant le plus aux émissions au Québec. Où est la cohérence par rapport à sa position pro-Kyoto?

La conférence de Bali

Lors de leur dernière rencontre à Bangkok, en mai dernier, 400 experts du GIEC ont affirmé que le niveau d’émissions des GES doit être stabilisé au plus tard d’ici 2015, puis ensuite être réduit radicalement. […] Pour en débattre et trouver des solutions, la conférence de Bali de décembre 2007 sera cruciale : on devra y discuter sérieusement de ce qu’on fera après 2012, quand le Protocole de Kyoto prendra fin. Bien sûr, on ne peut rien attendre de positif de Harper, Bush et Howard. Il faudra donc arriver à un consensus le plus large possible, mais sans eux et leurs valets […]. Même en termes strictement monétaires – puisque telle est l’obsession des forces capitalistes à l’œuvre dans le monde –, l’idée qu’il sera bien plus coûteux de ne rien faire que d’agir contre le réchauffement climatique fait son chemin […].
[…] À l’approche de l’élection américaine de 2008, de celle du 24 novembre 2007 en Australie et des prochaines élections fédérale et provinciales au Canada, espérons que les populations l’auront compris et qu’elles porteront au pouvoir des gouvernements plus responsables, qui ont à cœur la protection de la planète et de ses habitants.

 

 


 

Par Jean-Guy Vaillancourt
 Sociologue

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