Le mouvement syndical définit sa position sur les enjeux reliés aux changements climatiques

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Par Gilles Bourque,
Coordonnateur des Éditions Vie Économique (EVE), coopérative de solidarité


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Mots clés : mouvement syndical, international, changements climatiques, politiques publiques, emplois verts

Au cours de cette année, tous les gouvernements participeront aux négociations en vue de l’adoption d’un nouveau traité prenant le relais du Protocole de Kyoto qui s’appliquait à la période 2008 2012. Les enjeux reliés à ces négociations dépassent largement la seule question des émissions de CO2. Ils touchent plus globalement la façon dont les sociétés actuelles produisent et échangent les biens et les services utiles au bien-être des populations, puisque ces activités ont des impacts sur le climat.

C’est pourquoi le mouvement syndical est, depuis les débuts, partie prenante à la lutte contre les changements climatiques et, de façon plus générale, au passage à une économie plus soutenable. La Confédération syndicale internationale (CSI) a pris le leadership dans ce domaine. Rappelons que la CSI représente 168 millions de travailleuses et travailleurs au sein de 311 organisations nationales affiliées, dans 155 pays. La création en 2004 de la Confédération résultait d’une démarche de regroupement du syndicalisme international; la Confédération intègre maintenant les organisations anciennement affiliées à la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), à la Confédération mondiale du travail (CMT), ainsi qu’à huit autres organisations sans affiliation internationale.

La mobilisation du mouvement syndical en prévision de Copenhague

C’est dans le cadre de sa participation aux négociations de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) que la CSI a pris l’initiative de lancer une campagne syndicale visant à intégrer la justice sociale aux mesures de transition vers une économie à faible intensité de carbone. Au cours du premier volet des pourparlers visant l’adoption d’un nouveau traité, par ailleurs signé à Bonn en avril dernier, plusieurs organisations du mouvement syndical ont insisté sur la nécessité de garantir le caractère équitable de la transition vers une société à faible intensité de carbone, moyennant l’inclusion dans l’accord d’un cadre de transition juste pour les communautés et les travailleurs.

« Le nouveau traité climatique adopté à Copenhague devra être porteur d’un message d’ambition et d’équité », a déclaré Guy Ryder, secrétaire général de la CSI. « Nos organisations s’engagent à soutenir la réalisation de mesures ambitieuses en matière de réduction des émissions. L’inclusion d’un cadre de transition juste dans le traité est un facteur essentiel pour une mise en œuvre fructueuse de ce processus. »

Le mouvement syndical est conscient du fait que les transitions ne seront pas des processus simples et que la transition vers une économie à faible émission de GES représente un défi colossal. Mais si les transitions sont mal gérées, ce seront les plus pauvres qui en paieront le prix fort. D’où la nécessité pour la CSI de soutenir et d’assister les plus vulnérables au cours du processus de transition; la justice climatique, la défense des droits et la protection sociale constituent des préalables indispensables à toute transition juste et durable.

« Les syndicats sont préoccupés par la lenteur des négociations et la prolifération des forums de prise de décision. Nous nous engageons à poursuivre nos efforts envers une prise de décision à point nommé et une transition réelle et équitable vers une économie faiblement carbonée […] ; pour y parvenir, nous devons amener les gouvernements à reconnaître le rôle que les syndicats peuvent jouer envers l’accomplissement d’un consensus et l’établissement de conditions propices pour la grande transition qui doit avoir lieu », a déclaré G. Ryder. Pour accéder directement au document de la CSI, cliquez ici.


Intervention sur toutes les tribunes

Cette mobilisation syndicale ne se limite pas au sommet du mouvement. Elle est reprise par ses composantes nationales qui les intègrent dans leurs programmes nationaux. C’est le cas, par exemple, des Trade Union Congress (TUC) de la Grande-Bretagne qui en ont fait un axe fondamental de leur plateforme de revendications (voir Unlocking Green Enterprise: A Low-Carbon Strategy for the UK Economy). Pour les TUC, le gouvernement britannique doit jouer un rôle beaucoup plus actif, en permettant une diminution significative des émissions de GES, et en même temps, en veillant à ce que les entreprises nationales développent leurs capacités en vue du passage à une économie de faible intensité en carbone. Pour les syndicats britanniques, le développement d’une économie verte est indissociable d’une stratégie ambitieuse sur le plan des luttes contre les changements climatiques.

Comme le mentionnait Brendan Barber, secrétaire générale des TUC, à l’occasion d’une conférence de l’Organisation internationale du travail (OIT) à Genève :

« Unless we build a green economy out of the rubble of the greed economy, the next global crisis will surely be even worse » […] « So the choice we face is clear – to retreat into the global comfort zone of business as usual or to give globalisation a human face, and our planet a fighting chance of survival. Let’s make sure we do the right thing ».


Une lutte globale contre un modèle de développement insoutenable

Comment transformer la lutte contre les changements climatiques en occasions de relance de l’emploi et de développement durable : ce défi doit être au centre des débats. La création « d’emplois verts » peut être l’une des solutions aux problèmes socioéconomiques posés par les changements climatiques.

C’est en ces termes que la Commission syndicale consultative auprès de l’OCDE (CSC-OCDE) a également lancé un appel aux dirigeants du monde développé afin de favoriser la mise en place de mécanismes de consultation et d’actions conjointes avec les partenaires sociaux relativement aux stratégies nationales de lutte contre les changements climatiques. Mais, pour les dirigeants syndicaux, cette lutte doit également permettre d’assurer le transfert systématique de ressources et de technologies vers les pays en développement, afin de maximiser l’efficacité de la lutte, tout en donnant à ces pays des moyens supplémentaires d’action.

L’organisation syndicale en profite pour appeler une nouvelle gouvernance mondiale, en demandant à l’OCDE de démontrer sa pertinence aux sociétés qui sont confrontées aux enjeux de la mondialisation. Selon la CSC-OCDE, les décisions prises par l’OCD en 2007 d’augmenter le nombre de ses membres et d’intensifier le dialogue avec les principaux pays émergents soulèvent de nombreuses questions en ce qui a trait à la mission future de l’Organisation et à son efficacité. Le moment serait donc venu de réactualiser le Protocole d’accord avec l’Organisation internationale du travail concernant des travaux conjoints sur les droits des travailleurs, le travail décent, les migrations, la suppression des discriminations, le développement des emplois « verts », la responsabilité des entreprises, ainsi que le respect des droits fondamentaux du travail dans les pays adhérents.

La CSC-OCDE demande aux ministres de mettre à profit leurs discussions dans le but de :

  • prendre des mesures gouvernementales coordonnées, afin de réduire au minimum le risque d’augmentation du chômage, et de soutenir le travail décent;
  • veiller à ce que les marchés financiers et, notamment, les fonds d’investissement et les fonds souverains, soient réglementés de manière efficace; et veiller à ce que les régimes fiscaux servent à redistribuer les coûts et les bénéfices de la mondialisation et à renforcer la coopération internationale dans la lutte contre le blanchiment d’argent et la criminalité fiscale;
  • prendre des mesures permettant de remédier à l’accroissement des inégalités, et favorisant en particulier la réalisation d’audits d’équité dans tous les domaines d’action des pouvoirs publics;
  • poursuivre, dans le prolongement des réunions du G8 en 2007, les travaux visant une dimension sociale de la mondialisation et la définition d’une approche plus efficace de leur responsabilité sociale, ainsi que de la responsabilité des entreprises;
  • assurer une cohérence au niveau mondial dans la définition et la gestion des problèmes d’atténuation des changements climatiques, et dans la mise en place d’un programme d’action aux fins d’une transition juste favorisant les emplois écologiques ou « verts »;
  • prendre des mesures d’urgence pour que les pays de l’OCDE respectent leurs engagements en matière d’aide au développement, en raison de la recrudescence de la faim et de la pauvreté déclenchée par l’augmentation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie.

 


Par Gilles Bourque,
Coordonnateur des Éditions Vie Économique (EVE), coopérative de solidarité


Gilles Bourque détient une maîtrise en sciences économiques et un doctorat en sociologie économique à l’UQAM.  Il est l’auteur du livre Le modèle québécois de développement : de l’émergence au renouvellement, paru au PUQ, qui s’est mérité le premier Prix pour la meilleure thèse de doctorat de l’IREC (Institut de recherche en économie contemporaine) en 2000.


La mission de Les Éditions Vie Économique (EVE), coopérative de solidarité, est de créer un groupe de presse visant à soutenir la diffusion des connaissances provenant de la pratique et de la recherche sur la vie économique actuelle, dans une perspective de développement durable.


 

Cette analyse est rendue possible grâce à une collaboration mensuelle
entre GaïaPresse
et les Éditions Vie Économique (EVE)

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