Croissance économique et érosion de la résilience des écosystèmes au Québec

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Par Sylvie Woods,
Ex-candidate du Parti vert du Québec, et membre de plusieurs organisations environnementales


 

Mots-clés : écosystèmes, cycles biologiques, biodiversité, externalités, limites planétaires, seuils planétaires.

En 2009, des chercheurs provenant d’horizons divers ont mis en commun leurs efforts pour évaluer scientifiquement l’état des écosystèmes planétaires. Ce qu’ils appellent le « système de la Terre » fut l’objet de leur étude : un ensemble complexe constitué des processus socio-économiques et des processus biophysiques, intégrant tous les cycles naturels à l’origine de l’état environnemental de notre planète dans ses dimensions spatiale et temporelle (1).

Les différents cycles biologiques naturels ont été analysés sous l’angle de systèmes complexes non linéaires. L’atteinte d’un seuil, défini aussi comme une transition non linéaire agissant comme un point de basculement, peut donner lieu à un changement irréversible de l’état d’un écosystème entier (2).

Le concept de « limites planétaires » se veut un cadre pour concevoir une nouvelle approche de gouvernance et de gestion, qui rompt avec les analyses sectorielles et fragmentaires ayant pour effet de minimiser les externalités. Les limites planétaires rappellent l’importance de déterminer une zone sécuritaire pour le développement humain et éviter un bouleversement à l’échelle planétaire, entrepris depuis le début de l’ère industrielle.

Cette pression provenant des activités humaines pourrait entraîner des bouleversements irréversibles pour les systèmes biophysiques de la Terre. Cette approche basée sur l’établissement de seuils s’appuie sur trois champs d’études scientifiques :

  • L’échelle de l’action humaine en relation avec la capacité biophysique de la planète et la capacité des écosystèmes à se régénérer en regard de l’expansion économique;
  • La compréhension du système de la Terreet du développement durable;
  • La prise en compte du cadre conceptuel de la résilience des écosystèmes, des systèmes complexes et de l’autorégulation des systèmes vivants (James Lovelock).
Une approche qui repose sur les principes suivants :
  • Limiter la croissance économique et démographique;
  • Établir des standards minimums de sécurité;
  • Respecter le principe de précaution;
  • Permettre des fenêtres tolérables sur l’avenir.

Les scientifiques ont délimité neuf seuils planétaires. Les connaissances scientifiques seraient suffisantes pour quantifier sept limites planétaires, sauf en ce qui concerne la charge d’aérosol et la pollution chimique de l’atmosphère, dont les données sont insuffisantes.

Les neuf seuils planétaires couvrent :
  • Les cycles biogéochimiques du nitrogène, du phosphore, du carbone et de l’eau;
  • Les systèmes de circulation physiques majeurs de la Terre : le climat, la stratosphère, les systèmes des océans;
  • Les caractéristiques biophysiques de la Terre, qui contribuent à la résilience sous-jacente des écosystèmes, et sa capacité d’autorégulation (les biodiversités terrestre et marine);
  • Deux caractéristiques critiques associées à des changements globaux anthropogéniques soit la charge d’aérosols et la pollution chimique.

Les travaux des chercheurs permettent d’affirmer que l’humanité a déjà dépassé trois de ces seuils planétaires :

  • Les terres cultivables : les humains ont interféré dans le cycle du nitrogène notamment par la déforestation en raison de l’exploitation des terres agricoles et de l’usage intensif de pesticides depuis les années 50.
  • Le réchauffement climatique qui s’accentue depuis les années 1980. La quantité de gaz carbonique augmente à un rythme insoutenable. Le réchauffement climatique est à l’origine de l’acidification des océans dont le taux est 100 fois plus rapide qu’au cours des 20 dernières années. La limite proposée par les scientifiques (réduire le CO2 sous le seuil de 350 parties par million le plus rapidement possible)vise à minimiser la réponse non linéaire, abrupte et irréversible, des systèmes de la Terre. Et d’éviter le bouleversement des climats régionaux et l’effondrement de la dynamique climatique comme la circulation thermohaline;
  • L’usage de l’eau qui a atteint un seuil critique ainsi que l’altération des sols.


En attendant « la reprise »

« Les indicateurs économiques reflètent nos choix sociaux, nos valeurs et nos objectifs. Nous mesurons ce que nous estimons être important et nos choix et indicateurs définissent implicitement nos objectifs. Comme la société change, ce qui est le plus important change également et les indicateurs devraient changer conformément à ces changements (3). »


S’il est admis que l’économie a pour but d’améliorer le bien-être collectif, il est de plus en plus reconnu que le développement actuel basé sur la croissance économique ne correspond plus à cet objectif. Au contraire, la croissance a généré des crises environnementales et sociales sans précédent dans l’histoire humaine. Le temps n’est-il pas venu de recourir à d’autres indicateurs que le PIB pour définir le développement économique et humain? L’humanité gagnerait à délaisser l’accroissement de richesses, néfastes pour la vie elle-même, pour adopter des valeurs nouvelles.

Robert Costanza, figure de proue de l’approche de l’économie écologique, a amplement démontré que le PIB, en tant que principal indicateur de l’évaluation de la richesse nationale, s’est révélé inapproprié pour mesurer le bien-être général de la population.

Comment peut-on ignorer les travaux de Costanza et de ses collègues économistes écologistes qui, depuis près de 30 ans, ont contribué à faire connaître une nouvelle approche multidisciplinaire du développement économique et de la prospérité, qui intègre le capital naturel, dans la fonction de production des activités économiques comme variable non substituable, ainsi que le capital humain?

En outre, dans la même constellation, des chercheurs et scientifiques rattachés à l’Université de Copenhague ont fondé le regroupement Résilience alliance (4) dont les travaux sont complémentaires de l’approche des économistes écologiques. Leurs travaux démontrent l’importance de maintenir la résilience des écosystèmes dans le cadre du développement des collectivités et de leur soutenabilité. Ces chercheurs ont également mis de l’avant une autre conception de la gouvernance. Les gouvernements actuels ont fait du PIB leur principale boussole pour mettre en œuvre leurs politiques de développement. Le concept de résilience, élaboré par des chercheurs provenant de tous les horizons scientifiques, nous offre la possibilité de concevoir la gestion sociale et économique dans le respect des seuils des écosystèmes afin d’assurer leur pérennité. La résilience devient alors le socle sur lequel repose une gestion basée sur l’adaptation faisant une large place à la notion d’incertitude. Cette notion si fondamentale et déterminante, lorsqu’on considère les écosystèmes en tant que systèmes complexes non linéaires, susceptibles de se transformer lorsqu’ils atteignent un seuil. Le phénomène entraîne alors un changement d’état irréversible des écosystèmes.

 

Le fleuve Saint-Laurent

Notre dernier hiver trop doux, suivi d’un printemps hâtif et des températures élevées par rapport aux normales, a laissé le fleuve dépourvu de son couvert de glace habituel. Le golfe du Saint-Laurent a pu être observé sur des milliers de kilomètres, soit du Bas-Saint-Laurent jusqu’à la Côte-Nord, atteignant le plus bas niveau historiquement (5). Cette perturbation de l’écosystème fluvial s’est manifestée à l’embouchure de la rivière Bécancour qui se déverse dans le fleuve. Les biologistes ont découvert à cet endroit des milliers de poissons morts ayant succombé au manque d’oxygène. Ce phénomène a aussi été observé dans le secteur de Sept-Îles.

« Le phénomène appelé « hypoxie» touche une grande partie de l’estuaire maritime du Saint-Laurent et de l’ouest du golfe Saint-Laurent. Les niveaux d’oxygène des eaux profondes sont alors si bas que le milieu devient impropre à la survie des poissons, des mollusques ou autres organismes marins. Depuis 70 ans, à plus de 250 mètres dans les eaux du Saint-Laurent, l’oxygène a diminué de moitié. Les scientifiques attribuent en partie le phénomène au réchauffement de l’eau et à l’activité humaine (6). » 

Dans certains parcs nationaux, comme dans le parc national des Hautes-gorges-de-la-Rivière- Malbaie, les activités de navigation sur la rivière ont été interrompues dès la mi-juin, compromises par le bas niveau d’eau de la rivière. Cette perturbation a donc eu des répercussions importantes sur les organismes marins et sur les activités récréatives. Les écosystèmes du fleuve Saint-Laurent auraient-ils atteint un seuil de basculement quant à leur résilience et serait-il en train de changer d’état? Sa résilience ne peut qu’être affaiblie par le réchauffement climatique et l’acidification croissante des océans (7). Les nombreux barrages hydro-électriques existants ou en construction font également pression sur les systèmes fluviaux.

En parallèle à ces événements, une recherche scientifique effectuée par l’Université de Dalhousie sur le phytoplancton (8) révélait son importante dégradation dans l’ensemble des océans, soit une diminution de 40 %, depuis 1950. Ces micro-organismes marins se situent à l’origine de la chaîne alimentaire des espèces marines et jouent un rôle fondamental pour les écosystèmes marins.

 

Choisir d’autres indicateurs de développement

Les projets de développement contribuent dorénavant à réduire la résilience des écosystèmes patrimoniaux et leurs effets se répercutent dans la cour de chaque citoyen québécois, puisque le fleuve Saint-Laurent est le plus grand bassin versant au Québec et que la moitié de la population réside le long de ses rives (9).

Déjà en 2007, M. Harvey Mead, alors commissaire au développement durable, utilisait l’indicateur de l’empreinte écologique et démontrait (10) que le mode de vie des Québécois et la pression sur les écosystèmes produite par la croissance du PIB des dernières décennies nécessiteraient l’équivalent de trois planètes, si chaque citoyen du monde accédait au même mode de vie, compte tenu de la limite des ressources naturelles et de leur capacité à se régénérer.

Trois ans plus tard, en 2010, M. Jean Cinq-Mars, nouveau commissaire au développement durable, observait que le gouvernement québécois ne possède pas de données sur l’état de sa biodiversité nationale. Il ne peut donc en tracer un portrait exact et cette méconnaissance persiste malgré la Loi sur le développement durable votée en 2006. Pourtant, l’un des principes de la loi exige une gestion à long terme afin d’assurer la pérennité de la biodiversité. Également, dans son dernier rapport (11), le Commissaire souligne que le gouvernement québécois n’assume pas le suivi sur les conséquences de la croissance démographique. D’autant plus, que celle-ci s’est accentuée et exerce une pression sur nos écosystèmes, alourdissant notre empreinte écologique :

« En 2001, l’enjeu des changements démographiques avait déjà retenu l’attention du Vérificateur général du Québec. Celui-ci s’était alors intéressé plus particulièrement à la gestion, par l’Administration, des risques qui y étaient associés. Voici les principaux constats qui avaient été formulés à l’époque :

  • Il restait encore du chemin à parcourir pour établir un portrait global de la situation et définir les risques.
  • Les ministères et organismes avaient entrepris plusieurs initiatives afin de s’ajuster aux changements démographiques. Cependant, on notait l’absence d’une stratégie globale impliquant une vision à long terme et permettant d’associer aux orientations et aux priorités gouvernementales des objectifs précis et mesurables, de définir clairement les responsabilités des acteurs et de structurer leurs actions (12)

Découvrir la richesse du capital naturel

Dans ce même rapport, le Commissaire Cinq-Mars, cite une recherche de l’Institut Pembina qui démontre que l’exploitation forestière en milieu boréal peut s’avérer coûteuse, si l’on comptabilise la perte des services rendus par le capital naturel altéré par la coupe d’une forêt vierge. D’ailleurs, l’exploitation de la forêt boréale constitue une illustration emblématique de la façon dont la gestion économique gouvernementale actuelle évacue les bénéfices inestimables des services rendus par nos écosystèmes :

« La disparition des espèces et de leurs écosystèmes compromet les biens et services qu’ils nous procurent gratuitement. En 2005, la forêt boréale canadienne a fait l’objet d’une évaluation de ses écosystèmes et de la valeur réelle de son capital naturel par le Pembina Institute. L’étude a permis de chiffrer les biens et services non marchands provenant des écosystèmes de la forêt boréale à 93,2 milliards de dollars en 2002, ce qui correspond à plus du double de la valeur marchande de la forêt, laquelle était estimée à 37,8 milliards de dollars. Cet écart démontre que la valeur des biens et services que nous fournit la forêt boréale est sous-estimée lorsque l’on ne considère que la valeur marchande (13). »


Cet exemple révèle les limites du PIB, lorsqu’il est utilisé comme principal indicateur de la richesse produite au Québec et du niveau de bien-être. En fait, il ne correspond plus à la réalité. Le PIB occulte la perte de biodiversité, sous-estime les services rendus par le capital naturel et minimise les coûts associés à la dégradation des écosystèmes qu’exercent les croissances démographique et économique.

 

Le changement d’état de nos forêts

Le premier bilan du forestier en chef portant sur l’état des écosystèmes forestiers du Québec paru en 2010 (14) trace le portrait de la production forestière pour la période de 2000 à 2008. La Loi sur le développement durable constitue le cadre d’évaluation de ce bilan. L’évaluation de l’écosystème forestier est présentée à partir de 23 critères qui sont regroupés sous cinq thèmes : l’environnement, l’économie, la société, les Premières Nations, la gouvernance. Il constate en autres, que les massifs de forêts mûres ou surannées se raréfient et que la matrice forestière se transforme. Les jeunes peuplements commencent à former la principale matrice forestière.

Les peuplements de forêts surannées ou anciennes forment alors des îlots au sein de jeunes peuplements dans les forêts aménagées. Il n’y a plus de connectivité entre les vieilles forêts (plus de 100 ans). Cela a des conséquences sur l’habitat des espèces animales et végétales (fragmentation de leur territoire) qui se déplacent et une nouvelle configuration spatiale des écosystèmes forestiers émerge.

Le rapport établit que le ministère des Ressources naturelles et de la Faune ne dispose pas d’un programme de suivi pour évaluer la dégradation des écosystèmes forestiers et les conséquences qui s’ensuivent pour la biodiversité. Le gouvernement tente de réduire l’empreinte écologique en modifiant les patrons de coupe et la répartition spatiale de l’exploitation forestière. Cependant, les méthodes utilisées pour doter la forêt résiduelle d’un semblant de forêts restées intactes demeurent inadéquates. Depuis les années 1970, l’aménagement forestier n’arrive pas à restaurer les conditions écologiques naturelles pour préserver les écosystèmes forestiers et a entraîné une perte de biodiversité.

« L’humanité reçoit plusieurs services des écosystèmes (tel que l’eau potable et l’air, la production de nourriture, le carburant, ect.). Toutefois, l’action humaine peut réduire à néant ces services rendus par les écosystèmes, avec des répercussions sur le mode de vie des humains, leur vulnérabilité et leur sécurité. De tels changements négatifs entraînent une perte de résilience des écosystèmes (15). »


Le maintien de la productivité actuelle dans l’exploitation forestière a altéré la résilience des forêts : il y a eu changement d’état de la forêt. Au Québec, il ne resterait que 10 % à 15 % de couvert forestier vierge à la limite sud de la ligne commerciale nordique et 88 % des forêts sur les terres publiques ont été exploitées commercialement par l’industrie
(16).

 

D’un monde « à développer » à un monde « saturé »

Chacun est maintenant dans la cour de quelqu’un d’autre. (17)

Les économistes écologistes insistent : la croissance économique doit être reconsidérée à la lumière d’un monde qui a profondément changé depuis l’adoption du PIB comme unique indicateur économique et instrument de mesure de la prospérité.

Entre 1976 et 2006, le PIB a cru de 71 %, au Québec, selon l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) (19). En conséquence, notre territoire pourrait être considéré comme « saturé», si on peut dire, en regard des répercussions de la croissance économique sur nos écosystèmes nationaux. Cette croissance économique n’a pas contribué par ailleurs à améliorer la qualité de vie d’une large partie de la population, dont la contribution au PIB s’est traduite plutôt par une augmentation des heures de travail des ménages et même une stagnation de leurs revenus pendant les 30 dernières années. En contrepartie, la croissance économique a entraîné une richesse accrue pour la classe moyenne supérieure qui a vu ses rangs s’élargir, au détriment de l’équité sociale (et nous ajouterions de la dégradation des écosystèmes, mais ce volet n’est pas mis en corrélation dans cette étude) comme l’a si bien démontré le groupe IRIS (20).

 

Redéfinir le développement, la prospérité et la qualité de vie

De quelle façon, s’il y a reprise économique au Québec, l’accroissement du PIB améliorera-t-il la qualité de vie de la population? Rappelons-nous que la forte croissance de 1976 à 2006 n’a pas permis à une partie des salariés de l’État et des travailleurs non syndiqués de bénéficier de diminution d’heures de travail, de congés pour la conciliation travail-famille, de plus de temps libre pour s’impliquer dans des activités créatives, de bénévolat, ou citoyennes. Par ailleurs, cette croissance a multiplié les conflits sociaux quant aux usages du territoire. On ne compte plus les divers projets de développement mis de l’avant  : Rabaska et son port méthanier, la réfection de la centrale nucléaire Bécancour, les mini-centrales hydro-électriques sur les rivières ancestrales, le détournement des rivières Rupert et de la Romaine, l’oléoduc Alberta-Montréal-Sarnia pour les sables bitumineux de la pétrolière Enbridge, les sites d’extraction de gaz de schiste exploités par des compagnies albertaines en Montérégie, l’extraction du pétrole dans le Bas Saint-Laurent, en Gaspésie et près des côtes des Îles-de-la-Madeleine avec le projet Old Harry, les mines à ciel ouvert en Abitibi, la coupe des forêts anciennes en milieu boréal, la privatisation énergétique éolienne partout au Québec, les nombreux projets de construction d’autoroutes ou d’élargissement autoroutier.

C’est dans ce contexte que, lors des dernières négociations syndicales, il a été convenu entre les grandes centrales syndicales et le gouvernement que la rémunération des employés de l’État serait arrimée au taux de croissance du PIB pour les prochaines années. Cette entente amène donc près d’un demi-million de citoyens à soutenir tous les projets énumérés précédemment pour en partager les soi-disant bénéfices escomptés par la croissance du PIB. Si par contre on accepte de considérer d’autres indicateurs comme indices de la richesse nationale et du bien-être collectif, soit l’empreinte écologique, l’indice de progrès véritable, la perte de biodiversité, l’impact du réchauffement climatique, en prenant en compte le capital naturel, on constatera que cette entente fait des employés de l’État, des partenaires dans la participation au déclin de nos écosystèmes et de notre qualité de vie.

 « On peut citer à cet égard l’indice de bien-être économique soutenable et l’indicateur de progrès véritable. Ces indicateurs déduisent de la consommation une estimation du coût de la pollution de l’eau, de l’air et sonore et s’efforcent également de prendre en compte la perte des zones humides, des terres agricoles et des forêts primaires, et l’épuisement des autres ressources naturelles, ainsi que les dommages résultant du CO2 et de la dégradation de la couche d’ozone. L’épuisement des ressources naturelles est évalué par l’investissement nécessaire pour engendrer un flux perpétuel équivalent de substituts renouvelables. (…) Cela a conduit certains auteurs à émettre une hypothèse de « seuil » selon laquelle le PIB et le bien-être progressent parallèlement jusqu’à un certain point au-delà duquel la poursuite de la hausse du PIB n’engendre plus aucune amélioration du bien-être. En d’autres termes, selon ces indicateurs, nous avons dépassé les niveaux soutenables depuis longtemps et nous sommes déjà entrés dans une phase de déclin (21).»


Affairé à vendre le capital naturel à tout vent, le gouvernement actuel avec ses projets de développement axés sur la croissance du PIB, prétend inscrire dans sa gouvernance les principes de gestion du développement durable. En réalité, il n’atteint tout simplement pas les exigences minimales d’une soutenabilité faible (22).

 

 


Par Sylvie Woods,
Ex-candidate du Parti vert du Québec, et membre de plusieurs organisations environnementales

Écologiste, Sylvie Woods s’intéresse à l’économie écologique et particulièrement aux questions relatives à l’énergie et aux  transports durables, à l’endettement national et à l’impératif écologique en regard du réchauffement climatique. En 2009, elle a présenté au BAPE un mémoire sur l’échangeur Turcot pour le Parti vert du Québec.

 


Sources :

(1) Johan Rockström, Will Steffen, Kevin Noone, Åsa Persson, F. Stuart Chapin, Eric F. Lambin, Timothy M. Lenton, Marten Scheffer, Carl Folke, Hans Joachim Schellnhuber, Björn Nykvist, Cynthia A. de Wit, Terry Hughes, Sander van der Leeuw, Henning Rodhe, Sverker Sörlin1, Peter K. Snyder, Robert Costanza, Uno Svedin, Malin Falkenmark, Louise Karlberg, Robert W. Corell, Victoria J. Fabry, James Hansen, Brian Walker, Diana Liverman, Katherine Richardson, Paul Crutzen, Jonathan A. Foley, Planetary Boundaries : Exploring the safe operating space for humanity, Ecology and Society, 14 Septembre 2009. «The Earth System : is defined as the integrated biophysical and socio-economic processes and interactions (cycles) among the atmosphere, hydrosphere, cryosphere, biosphere, geosphere and the anthroposphere (human enterprise) in both spatial – from local to global – and temporal scales, which determine the environmental state of the planet within its current position in the universe. Thus, humans and their activities are fully part of the Earth System, interacting with other components. » Page 30.

(2) Ibid,  « Some Earth system processes, such as land use change, are not associated with known thresholds at the    continental to global scale, but may, through continuous decline of key ecological functions (such as carbon sequestration) cause functional collapses, generating feedbacks that trigger or increase the likelihood of a global threshold in other processes (such as climate change) ». Page 4.

(3) Costanza, Robert, Beyond GDP. The need for new mesures of progress, University of Boston, Pardee papers, no. 4, janvier 2009, P.26. [En ligne] Traduction libre : « Indicators reflect societal choices, values, and goals.We measure what we think is important and our choice of indicators implicitly defines our goals. As society changes, what is most important also changes and indicators should change to reflect that. GDP includes primarily those items that have readily quantifiable monetary value.»

(4) Resilience alliance. Research on resilience in social-ecological systems as base for sustainability. [En ligne]

(5) Francoeur, Louis-Gilles, Lacs et rivières crient au secours, Le Devoir, 17 juillet 2010. [En ligne]

(6) Radio-Canada, Estuaire du Saint-Laurent. Le fleuve suffoque, 16 juillet 2010.

(7) Hoegh-Guldberg, Ove, Bruno, John, The Impact of Climate Change on the World’s Marine Ecosystems, Science, no. 328, juillet 2010.

(8) Boyle, Daniel et al., Global phytoplankton decline over the past century, Dalhousie University, Nature, Vol. 466, 29 July 2010, p.591. « The researchers found that the number of phytoplankton has been decreasing by a rate of about  one per cent per year, for the past 110 years. While this might not seem like a large number, this translates into a decline of about 40 per cent since 1950. In total, just under half a million observations were compiled to be able to estimate phytoplankton levels through the years. (…) « Generating roughly half the planetary primary production, marine phytoplankton affect the abundance and diversity of marine organisms, drive marine ecosystem functioning, and set the upper limits to fishery yields. Phytoplankton strongly influence climate processes and bio­geochemical cycles, particularly the carbon cycle. Despite this far ­reaching importance, empirical estimates of long-term trends in phyto­plankton abundance remain limited. » Page 1.

(9) Ouranos, S’avoir s’adapter aux changements climatiques, 2010, « Les 395 000 habitants (Statistique Canada, 2005) de cette région maritime sont répartis dans 239 municipalités, dont 110 situées sur la côte. Parmi les plus importantes, on compte Sept-Îles, Havre-Saint-Pierre, Baie-Comeau, Forestville, Chandler, Sainte-Anne-des- Monts, Percé, Gaspé, New Richmond, Carleton-sur-Mer, Rivière-du-Loup, Rimouski, Matane et La Pocatière. Plus du quart de la population vit à moins de 500 m des berges (Dubois et al., 2006), et plus de 90 %, à moins de 5 km. ». Page 24. [En ligne]

(10) Mead, Harvey,  Rapport du commissaire au développement durable, Gouvernement du Québec, 15 décembre 2007. Annexe sur l’empreinte écologique. Pages 142-154. [En ligne]

(11) Cinq-Mars, Jean, Commissaire au développement durable,  Rapport du commissaire au développement durable, Gouvernement du Québec, 2009-2010. Page 3.7. [En ligne]

(12) Ibid, p. 2.19. Soulignements ajoutés.

(13) Ibid, p.2.19. La recherche du Pembina Institute : Counting Canada’ natural capital : assessing the real value of Canada’s boreal ecosystem, 2009, 76 pages. [En ligne]

(14) Bureau du forestier en chef, Bilan d’aménagement forestier durable du Québec 2000-2008,  294 pages. [En ligne]

(15) Folke, Carl et al., Resilience and Sustainable Development : Building Adaptive Capacity in a World of Transformations, The report has also been published together with ICSU (International Council for Science) in its Series on Sustainable Development (No 3 May 2002). [En ligne] « Humanity receives many ecosystem services (such as clean water and air, food production, fuel, and others). Yet human action can render ecosystems unable to provide these services, with consequences for human livelihoods, vulnerability, and security. Such negative shifts represent loss of resilience.» Traduction libre, page 7.

(16) Mainville, Nicolas pour Greenpeace,  Refuge boréal. Rapport sur les dernières forêts intactes du territoire forestier québécois, 2010. [En ligne]

(17) Folk, Carl, Holling, C.S., Biological Diversity, Ecosystems, and the Human Scale: Ecological Applications, Vol. 6, No. 4 (Nov., 1996), pp. 1018-1024, Published by : Ecological Society of AmericaStable [En ligne] Accessed: 20/04/2010 20:09. «Everyone is now in everyone else’s backyard.» page 1021.

(18) Costanza, Robert, A New Development Model for a «full» World, Society for International Development 1011-63700, 2009. [En ligne

(19) Couturier, Eve-Lyne, Schepper, Bertrand, Qui s’enrichit, qui s’appauvrit, 1976-2006, Institut de recherche et d’informations socio-économiques, 2010. [En ligne]

(20) Ibid. Chapitre  6 , pages 26-29.

(21) Stigitz, Joseph E. et al., Rapport de la commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social, 2010, page 72. [En ligne

(22) Ibid, « L’approche « faible » de la soutenabilité considère qu’une bonne performance dans certains domaines peut compenser une mauvaise performance dans d’autres domaines. Cette idée autorise une évaluation globale de la soutenabilité faisant appel à des indices unidimensionnels ou scalaires. L’approche « forte » consiste à dire que la soutenabilité impose de maintenir à la fois la quantité et la qualité d’un grand nombre d’éléments environnementaux différents. Appliquer cette dernière approche requiert par conséquent de vastes ensembles de statistiques séparées, chacune ayant trait à un sous-domaine particulier de la soutenabilité globale. » page 69

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