Chronique d’une mort annoncée ou comment le Québec mine sa biodiversité

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Par Patrick Nadeau,
Directeur général de la SNAP Québec


Le Sommet de Nagoya sur la biodiversité se terminera le 29 octobre. Sans surprise, il s’agira d’une énième conférence onusienne sur l’environnement qui se soldera par un constat d’échec. La biodiversité vit sa plus grande crise d’extinction d’espèces depuis les dinosaures et nous en sommes les principaux responsables.  Mea culpa planétaire.

Au Québec, la situation n’est guère plus encourageante. Plus de 500 espèces ont un statut précaire, et le nombre s’accroît sans cesse. Le 28 septembre dernier, un biologiste du ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs avouait à Radio-Canada que le Québec avait été incapable de freiner l’érosion de sa biodiversité, malgré les outils dont il dispose et les engagements pris. Certes, la perte de biodiversité est un phénomène méconnu, et contrairement aux changements climatiques, il est peut-être plus difficile de pointer les coupables du doigt. Il n’en demeure pas moins qu’il y a des décisions prises quotidiennement par le gouvernement du Québec qui ont un impact direct sur la biodiversité – et inversement, des décisions qui ne sont pas prises, faute de vision, et qui lui nuisent tout autant.

Un exemple flagrant de ce manque de vision est le projet de loi modifiant la Loi sur les mines piloté par le ministre délégué Serge Simard, dont l’étude détaillée débutait cette semaine à l’Assemblée nationale (ironiquement, en même temps que la conférence de Nagoya). Malheureusement, ce projet de loi maintient le statu quo sur plusieurs éléments archaïques de l’ancienne loi, tel que la préséance des activités minières vis-à-vis tous les autres usages possibles du territoire. Conséquence directe sur la biodiversité: dès qu’une compagnie minière aura « claimé » un territoire, peu importe si elle y réalisera des travaux ou non, il sera impossible d’y créer de nouvelles aires protégées, donc de protéger la diversité biologique de ce territoire. Pourtant, les aires protégées sont parmi les meilleurs outils à notre disposition pour atténuer cette perte. Ironie du sort, le gouvernement Charest s’est fixé l’objectif d’atteindre 12 % d’aires protégées au Québec d’ici 2015, chiffre qui lui sera beaucoup plus difficile à atteindre, voire impossible dans certains secteurs, à cause de sa propre Loi sur les mines.

La science nous démontre clairement que la perte d’habitat est la première menace qui pèse sur la biodiversité terrestre de la planète. Lorsque nos élus ont la chance d’agir pour freiner cette perte, ils ont le devoir de le faire. Québec devra ainsi redoubler d’efforts pour protéger sa biodiversité, en commençant par une réforme en profondeur du projet de loi de M. Simard.

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