Portrait de l’explosion de l’agriculture urbaine à Cuba

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Par Marie-Eve Cloutier et Dorothée Bezançon

Mots-clés : Écocité2011, biodiversité, agriculture urbaine, Cuba

 


Un fermier cubain.
Photo d'Adam Jones. Tous droits réservés.

D’une monoculture qui a détruit 86 % des ressources forestières, Cuba assure maintenant sa sécurité alimentaire en pratiquant la permaculture, l’agriculture urbaine et l’élevage de petits animaux en ville. L’introduction de ces nouvelles pratiques a permis de pallier la crise alimentaire que le pays connait depuis les années soixante.

« 75 % des produits frais consommés à Cuba proviennent de l’agriculture urbaine », affirme Maria Caridad Cruz Hernandez, coordinatrice au Urban Sustainability Program à la Antonio Nuñez Jiménez Foundation for Nature and Humanity à La Havane, lors d’une conférence au Sommet mondial ÉcoCité2011 à Montréal le 26 août. « Ce type d’agriculture, ajoute-elle, est pratiqué par environ 300 000 Cubains sur une superficie de plus de 50 000 hectares. »

La déforestation causée par l’industrie de la canne à sucre et l’industrie du bois ainsi que la monoculture a fini par engendrer une crise alimentaire sur l’île. « Il y a 25 ans, les habitants se sont mis à pratiquer l’agriculture urbaine afin d’assurer leur survie. Aujourd’hui, le mouvement se répand dans toutes les villes et crée de l’emploi. L’agriculture urbaine est de type “permanente” dans les périphéries et “temporaire” au cœur des villes », explique Mme Cruz.

Un des défis actuels dans les centres urbains réside dans l’efficacité des aménagements pour une meilleure gestion des espaces. Une des solutions récentes du gouvernement a été de donner des terres dédiées à l’agriculture en périphérie des villes afin de les désengorger.
 

Reconstruire la biodiversité

La crise vécue à Cuba a aussi causé une lourde perte de biodiversité. « Certains fruits et légumes méconnus de jeunes cubains ont été réintroduits grâce à l’agriculture urbaine. On assiste à une reconstruction de la biodiversité particulièrement dans les milieux de culture familiaux et communautaires favorisant l’échange et la conservation de semences », dit Mme Cruz.

Oliver Hiller, du secrétariat de la Convention sur la diversité biologique des Nations Unies, révèle que « 34 % des gens les plus éduqués en Europe n’ont jamais entendu parler de biodiversité ». Pourtant, cette Convention regroupe actuellement 193 pays membres. Cependant, il reste aux gouvernements de faire l’effort d’appliquer le Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020.


Une prise de conscience canadienne?

David Welch, professeur à l’Université d’Ottawa, s’est demandé si « le Canada aura besoin lui aussi d’une crise majeure afin de pratiquer sérieusement l’agriculture urbaine ». À cela, Mme Cruz a répondu qu’il ne faut pas oublier que nous sommes tous en crise. « Nous ne l’avons pas encore intériorisée. La richesse n’est-elle pas dans une agriculture durable et dans la dignité humaine plutôt que dans les avoirs d’une personne? »

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