Les spécialistes de la santé qui secouraient les villes

0

Par Marie-Pier Boucher

Mots-clés : santé, environnement, aménagement, déplacement, espaces verts, Frumkin

 

L’aménagement des villes a un impact direct sur la santé de ses habitants. C’est pourquoi l'épidémiologiste Howard Frumkin croit que les professionnels de la santé devraient travailler de concert avec les urbanistes et les architectes afin de construire un environnement qui permettrait à tous de garder de bonnes conditions physique et mentale.

En effet, d’après les études de M. Frumkin, plus il y a de pistes cyclables, de trottoirs, d’escaliers et de parcs mis à la disposition des résidents d’un quartier, plus l’activité physique fait partie intégrante de leur quotidien et moins les problèmes de santé accourent. Ces aménagements sont toutefois quasi inaccessibles et parfois même inexistants dans certains arrondissements d’Amérique du Nord.
 


Le docteur Howard Frumkin a présenté cette image en guise d’exemple pour
illustrer à quel point l’environnement est bâti de manière à ce que les
gens marchent le moins possible… même pour aller au gym.


Ne marchez pas, roulez!

Le chercheur donne en exemple le cas des trottoirs. Certains secteurs ont des trottoirs, mais ils ne mènent nulle part, alors que d’autres n’en ont tout simplement pas. Ceux qui sont accessibles sont majoritairement mal entretenus, parfois dangereux ou bien ils sont trop éloignés de la destination finale. Tout cela ne facilite pas et n’encourage pas non plus le déplacement piétonnier. Sans trottoir, les gens ne marchent pas et finissent par prendre leur voiture pour chacun de leur déplacement, y compris pour se rendre à la boîte aux lettres située à quelques pas de l’endroit où ils demeurent. « Plus il y a de véhicules en déplacement, plus il y a de pollution et cela influence la qualité de l’air que l’on respire », souligne le docteur américain.

Howard Frumkin place donc son espoir dans le transport en commun, qu’il décrit comme un moyen efficace de promouvoir l’activité physique et par le fait même d’intervenir dans la santé publique. Parce qu’ils doivent faire le trajet à pied de la maison jusqu’à l’entrée du métro et de la sortie du métro jusqu’au travail et vice versa, « les personnes qui utilisent les transports en commun marchent en moyenne 19 minutes par jour et sont généralement en meilleure santé que celles qui se rendent au travail en auto », soutient le chercheur. Il explique par ailleurs que le taux d’obésité d’une personne diminue selon la distance effectuée à pied chaque jour.

Même l’intérieur des édifices n’invite pas les gens à être actifs, mais plutôt à se laisser transporter. Les halls d’entrée présentent aux visiteurs de « séduisants » ascenseurs, alors que les escaliers, eux, sont cachés un peu plus loin, derrière les murs, comme si leur fonction n’était nécessaire qu’en cas d’urgence.


Des villes d’obèses

Le docteur Frumkin dénonce la progression constante de l’obésité dans les pays développés. Par exemple, au Canada, le nombre de personnes obèses a doublé depuis les années 80. Il fait alors remarquer qu’habiter ou travailler près d’un parc ou d’un espace vert amène les gens à sortir, à se rencontrer et à faire de l’exercice. Et les enfants, eux, ont plus tendance à vouloir aller jouer dehors. Les effets qui s’ensuivent sont positifs puisque « les personnes qui ont accès à des espaces verts montrent moins de signes de stress et d’obésité », précise-t-il.

Aussi, selon une analyse réalisée dans un hôpital d’Atlanta par l’épidémiologiste, les personnes qui logent dans une chambre avec une vue sur des arbres plutôt que sur des murs de briques séjournent moins longtemps au centre de soins et de santé. « C’est le contact avec la nature qui nous permet de survivre », mentionne le chercheur.

 « Si on propose des alternatives aux gens, ils en tiendront compte. Le changement est possible et ça commence d’abord par les moyens que l’on utilise pour se déplacer », affirme avec optimisme M. Frumkin. L’événement annuel En ville, sans ma voiture! est justement organisé chaque mois de septembre à Montréal et à Québec, afin de sensibiliser la population à utiliser d’autres moyens de transport que la voiture pour circuler et à prendre conscience de l’impact que cela a sur l’environnement et sur leur santé. 

Partager.

Répondre