Les serres Lufa en bouturage

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Par Sarah Champagne

 

Mots-clés : agriculture urbaine, serre, fermes Lufa, toits verts, zonage, urbanisme

 

Les Fermes Lufa ont remporté leur pari. Après un an, la première serre commerciale montréalaise remplit ses promesses écologiques et économiques et est loin de tomber en jachère. Maintenant, ce sont des difficultés règlementaires qui freinent le plus leur croissance… et celle de leurs légumes.

Photo de Sarah Champagne – Tous droits résérvés

 

Une innovation à reconnaître

« L’ingénierie se contrôle, pas les politiques », affirme Yourianne Plante, responsable des communications. Ce ne sont pas les caprices des plantes qui empêchent l’entreprise de satisfaire les clients qui cognent à sa serre. L’enjeu c’est que Lufa ne peut se faire reconnaître comme « exploitation agricole », privant l’entreprise d’avantages importants, particulièrement des subventions et des exemptions fiscales accordées au milieu agricole.

Le Règlement sur l'enregistrement des exploitations agricoles (ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation) exclut tout immeuble destiné principalement à des fins d’industrie ou de commerce. Ce qui est précisément le cas de l’édifice sur lequel est installé Lufa, dont le zonage municipal indique « secteur commercial ».

Être unique en son genre n’a donc pas que des avantages. La simple permission de construire une serre pour faire pousser des légumes a même nécessité une autorisation particulière. Dans le cas de cette première serre, l’arrondissement d’Ahuntsic a dû faire passer une résolution au conseil d’arrondissement permettant l’ajout d’un étage supplémentaire au bâtiment. Cette dérogation au Règlement sur les projets particuliers de construction ne change toutefois rien à l’impossibilité d’être reconnu comme exploitation agricole. En outre, « ça complique et retarde le processus de changer d’interlocuteur à chaque fois qu’on change d’arrondissement », déplore Yourianne Plante.

L’intégration de l’agriculture urbaine aux politiques municipales est une des revendications du Groupe de travail sur l’agriculture urbaine (GTAU).La ville de New York quant à elle proposait récemment des amendements à son règlement de zonagepour définir des « zones vertes » facilitant ainsi l’implantation de toits productifs. À quand un règlement « toit comestible » à Montréal ?

 Photo de Sarah Champagne – Tous droits résérvés

Une initiative rentable…

Malgré cela, après 12 mois d’activités, la première serre Lufa, poussée sur le toit d’un immeuble à proximité du marché central, démontre « que le concept roule », dit fièrement Mme Plante. Les demandes des compagnies, des banques et même des supermarchés se multiplient.

Lufa peut en effet se targuer d’être rentable en ce premier anniversaire, les coûts d’opération étant couverts par la vente des paniers de légumes. Quant aux investissements de départ, surtout la recherche préalable et l’infrastructure, ils seront amortis à très long terme, ou mieux, grâce à la multiplication des serres, explique Mohamed Hage, fondateur.

Une deuxième serre devrait d’ailleurs voir le jour cette année, dans l’arrondissement Saint-Laurent. On annonce que la superficie cultivée sera ainsi quadruplée, passant de 31 000 pieds carrés à plus de 120 000 au total.

 

 

Et écologique

L’impact écologique premier est de faire pousser des légumes sur un espace inutilisé de la ville. On avance aussi, en attente d’une confirmation de la part du propriétaire de l’immeuble, que le bâtiment entier bénéficie d’économies d’énergiede l’ordre de 20 %, la serre agissant comme un manteau sur le toit. Une partie de l’eau qui circule dans le système de culture hydroponique est aussi de l’eau de pluie récupérée. Les légumes sont en outre cultivés sans pesticide ni herbicide, se réclamant d’une agriculture « responsable » et « ultra-locale ».

Un modèle si enviable sera-t-il rapidement copié ? « Ce qu’on a réussi est un petit miracle », se réjouit Yourianne Plante, responsable des communications. « Lufa est difficilement copiable en ce sens où c’est un paquet de petits systèmes mis ensemble et adaptés qui garantissent notre succès », explique-t-elle. Pour nourrir tout Montréal, il faudra toutefois repenser l’urbanisme à fonction unique, pour accommoder la « cinquième façade ».

 

Source: GaïaPresse

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