Envisager l’après Rio

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Par Nathalie Guay
Conseillère syndicale
Service des relations du travail – recherche à la CSN


Mots-clés: Bilan Rio+20, développement durable, gouvernance

 

Lors d’un atelier portant sur les changements de paradigmes et les droits du travail, un syndicaliste italien a dit qu’il faudrait désormais parler de Rio -20. Les négociateurs des États ont même réussi à faire en sorte que le texte final soit encore plus timide que certaines versions antérieures. Rio + 20 a été un échec.

Il faut être lucide quant au résultat final. Le document « Le futur que nous voulons » est un reflet de la vision étroite et complètement vassalisée des États, réflétant l’abandon de leurs rôles, leurs responsabilités et leurs visions du futur.

Il n’y a là aucun courage, aucun espoir d’un changement de direction, aucune illusion permise.  Le document confirme le choix d’un langage volontaire, jamais contraignant. Avec ce texte, les États nous communiquent leur incapacité à relever ensemble le défi du maintien de la vie, telle que nous la connaissons, sur la planète.

 

Le Sommet des peuples

Quel formidable contraste nous a proposé le Sommet des peuples! Des dizaines d’alternatives ont été proposées face aux « fausses solutions du capitalisme ». Certaines sont solidement documentées, comme les propositions visant la création d’emplois verts et décents dans certains secteurs de l’économie. Également, celles visant une transition juste, ou la prise en charge démocratique de la production d’énergie renouvelable par les communautés. Le discours de cette société civile si diversifiée parvient à tracer les contours de cet autre modèle dont on parle partout depuis une douzaine d’années.

Oui, certaines critiques émises lors du Sommet des peuples, ont été formulées de nombreuses fois auparavant. Oui certains principes et alternatives sont présents, depuis des années, dans le discours des mouvements sociaux. Nous parlons ici des mouvements autochtones, des femmes, des paysans, des travailleuses et travailleurs, des droits humains, des noirs, des LGBT, des mouvements écologistes, de l’économie sociale et autres groupes.

 

Une voix unique

Pour la première fois, ces mouvements ont parlé d’une seule voix et se sont entendus sur une déclaration inspirante, de même que sur plusieurs autres textes qui détaillent les analyses et alternatives, pour une transformation radicale des sociétés.

Évidemment, cela n’aurait peut-être pas été possible à l’extérieur de l'Amérique latine, où un énorme mouvement social est en construction, alimenté par une décennie de forums sociaux, de luttes populaires, d’élections de gouvernements progressistes dans plusieurs pays.

Pour qui a suivi de près ces mobilisations, l’évolution est palpable et le projet de société beaucoup plus clair : post capitaliste,  orienté sur le principe de la vie bonne (bien vivir), féministe, et où la démocratie participative permet un contrôle social des ressources naturelles mais favorise aussi le développement d’économies plus localisées, communautaires et solidaires. Les mouvements sociaux se sont aussi engagés à mettre en place une mobilisation aussi audacieuse que l’appel à une journée mondiale de grève générale.

 

Construire un projet commun

Dans le parc Flamengo, ce discours empreint de liberté était bon à entendre, pour les militantes et militants du monde entier.

Plutôt que de le recopier, il s’agit désormais de s’en inspirer pour construire un peu partout des convergences aussi solides.

Pour nous, Québécoises et Québécois qui affrontons désormais un été au qualificatif incertain, l’intégration des luttes et mouvements  de nos camarades du Sud nous indiquent que, malgré les récents développements, nous ne sommes pas encore allés aussi loin que nous le pourrions dans la contestation du pouvoir en place et la formulation d’un projet commun. 

Après Rio, les mouvements de la société civile devront faire un bilan stratégique de Rio +20.

Notamment sur l’efficacité du lobbying face à d’autres types de stratégies.  La tenue de sommets parallèles – peut-être –  face à l’investissement massif des instances officielles. Les mouvements sociaux doivent mettre de l’avant des propositions pour transformer nos sociétés, tout en exigeant des États qu’ils défendent le bien commun.

 

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