Espoirs et déceptions à Rio+20

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Par Jessica Nadeau


Mots-clés : Rio+20,  Rio de Janeiro, Le futur que nous voulons, 15e conférence sur le climat, Copenhague.

 

Rio de Janeiro. Le nom fait rêver. Et pourtant, les dizaines de milliers de touristes qui convergent vers le paradis de la samba ces jours-ci ne rêvent ni de plages, ni de la fille d’Ipanema. Non, ils aspirent à un monde meilleur. D’un monde qui exploite ses ressources naturelles en respectant les générations futures.

D’un monde plus juste, plus équitable et plus vert. Du moins sur papier.

« Le futur que nous voulons. » C’est le nom du document légal qui sortira de cette rencontre Rio+20, le 23 juin prochain, après maintes et maintes négociations avec les représentants de plus de 160 pays. Et pourtant, ce texte ne sera ni plus ni moins que la réaffirmation des principes qui ont été admis il y a 20 ans, ici même à Rio, lors du Sommet de la Terre en 1992.

« Nous avons déjà un certain nombre d’engagements de la part des États, se réjouit Pragati Pascale, porte-parole de l’ONU pour Rio+20. Ce Sommet va mener à plusieurs actions concrètes. C’est comme cela que l’on juge(ra) de son succès. »

Il y a l’ONU. Il y a les chefs d’États, qui commencent à arriver depuis dimanche, dont Jean Charest, le premier ministre du Québec qui y passera la semaine.  Il y était il y a 20 ans, à titre de ministre de l’Environnement sous le gouvernement conservateur de Brian Mulroney.

Il y a aussi les ONG, la société civile, les autochtones, les jeunes, les entreprises, les lobbyistes, les syndicats, les scientifiques, les journalistes…

Depuis le 13 juin, ils sont plus de 30 000 à s’être inscrits à cet évènement international. Et on en attend autour de 50 000 personnes. Sans compter le Sommet des peuples pour la justice sociale et l’environnement, qui se tient en même temps à l’autre bout de la ville.

Cet évènement citoyen donne la parole à ceux et celles qui n’ont pas accès à la conférence officielle. À leur façon, ces gens contribuent à réinventer le monde. Ils dénoncent le manque d’actions pour lutter contre l’exclusion sociale et environnementale et le modèle capitaliste qui exacerbe la crise.

Ici aussi, ils sont des milliers, difficiles à chiffrer.  Ici aussi, au parc Flamengo sur le bord de la mer, ils déambulent entre les kiosques d’ONG, d’artisanat et de conférences. On y croise des gens issus de tous les horizons, des joggeurs et des cyclistes brésiliens,  dans un mélange d’odeurs de crème solaire, de Muzkol et de patchouli. Le Sommet des peuples présente des conférences principalement en portugais dans une ambiance festive,  mais somme toute très calme et ordonnée sous une supervision policière assez discrète.

 

Trop peu, trop tard?

En marge des conférences officielles, où l’on tente de négocier un accord qui devra être ratifié par tous les chefs d’État, des centaines de conférences parallèles donnent lieu à des échanges vivants entre des membres de la société civile et ce, à l’intérieur même du complexe de l’ONU. Pour plusieurs participants, c’est dans ces ateliers que résident les vraies solutions, car les négociations officielles annoncent peu d’avancement.

« Il n’y a rien sur la table de négociations qui va venir résoudre l’avenir de la planète », estime Éric Darier,  de Greenpeace International.« Le véritable problème, ce n’est ni le manque de connaissances, ni le manque de solutions, mais bien le manque de volonté politique », croit-il.

Ce discours de déception, il est perceptible de part et d’autres dans les coulisses du Sommet.

En effet, l’ONU avait demandé à la société civile de faire des propositions en préparation du  Sommet. Or, bien peu d’entres elles ont été inscrites dans le document de négociation officiel.

Plusieurs soutiennent qu’il est trop tard pour se contenter de réaffirmer ce que les États ont déjà accepté il y a 20 ans. Ils réclament des engagements plus précis, plus fermes et contraignants. « Il n’y a aucune plus value, dénonce Michel Prieur du Centre international de droit comparé de l’environnement. C’est un texte politique qui n’engage à rien, ce que l’on appelle du soft law. Mais là, ça va être du soft super soft! »

 

Les impacts de l’échec de Copenhague

Quant aux attentes internationales, elles semblent s’être essoufflées depuis l’échec la 15e Conférence sur le climat qui s’est tenue à Copenhague en 2009. Les environnementalistes pensaient avoir créé un momentum mondial pour engager les États en faveur d’une réduction des gaz à effet de serre et du renouvèlement du Protocole de Kyoto.

Amoindries par le président Obama et d’autres puissances mondiales, les propositions de Copenhague se sont finalement soldées par un échec sur le plan des actions. L’engouement des États s’est quelque peu dissipé et les attentes ont été revues à la baisse, surtout dans un contexte de succession de crises économiques.

Les uns sont dans la rue, au Sommet des peuples, les autres, dans les salles climatisées du Riocentro qui regroupent les conférences de l’ONU et les ateliers parallèles. Les ONG et les environnementalistes du monde entier entendent profiter de cette rencontre pour échanger, partager leurs solutions et faire des relations publiques.

Au delà des négociations officielles, c’est aussi cela, un sommet sur l’environnement.

 

Rio+20 : une logistique complexe

Accueillir 50 000 invités à la conférence  Rio+20 et fournir un accueil sécuritaire à des chefs d’États, délégués, ONG et médias, n’est pas une sinécure.  La tenue d’un tel évènement nécessite des années de préparation et une logistique complexe.

« C’est beaucoup plus compliqué d’organiser un évènement d’une telle ampleur à Rio plutôt qu’à New York, mais c’est excitant », confie Pragati Pascale,porte-parole de l’ONU pour le sommet Rio+20.

À New York, l’organisation des Nations Unies a déjà ses bureaux, ses installations et ses habitudes. En acceptant de tenir la conférence à Rio, à l’invitation du gouvernement brésilien, l’ONU doit déplacer quelque 400 membres de son personnel, superviser les installations physiques et bien d’autres détails. « Il faut tout inspecter, du design à la grandeur des salles, dans chaque pavillon. »

Les membres du personnel de chaque département ont été conviés en mission stratégique de planification pour que l’évènement puisse se tenir aujourd’hui. Tout cela implique des frais, mais c’est le pays hôte qui hérite de la facture.

Des soldats et policiers brésiliens armés assurent la sécurité du périmètre. Selon les chiffres de l’ONU, ils sont environ 3200, mais à l’intérieur du complexe Riocentro, ce sont les gardes de sécurité de l’ONU qui prennent la relève. « La sécurité va s’intensifier avec l’arrivée des chefs d’État dans les prochains jours, note la porte-parole. C’est toujours plus intense quand il y a des chefs d’État. »

Rio+20, c’est aussi une foire alimentaire qui offre des sandwichs au tofu et de la nourriture majoritairement biologique, un système de navettes qui transporte les délégués et autres membres des médias d’un point à l’autre de la ville, des milliers de volontaires formés sur les questions des droits humains et du développement durable, des génératrices propulsées au biodiesel, un complexe comprenant cinq pavillons.  

Tout cela sans que personne n’ait droit à une carte géographique imprimée : la conférence est sans papier et carboneutre! 

 

Source: GaïaPresse

 

GaïaPresse a pu envoyer la journaliste Jessica Nadeau à la Conférence des Nations Unies sur le développement durable à Rio au Brésil grâce à un soutien financier du Gouvernement du Québec. 

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