Lettre ouverte: Entre C-38 et Rio+20, le gouvernement du Québec doit défendre les intérêts supérieurs de la nation

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Monsieur le Premier ministre,

 

Depuis plusieurs mois, les citoyens québécois assistent impuissants à un désengagement planifié et sans retenue du gouvernement fédéral à l’égard de la protection de l’environnement. Ils sont par conséquent fort inquiets des impacts environnementaux, sociaux et économiques qui découleront de cette stratégie à courte vue.

Comme vous le savez, le projet de loi fédéral sur le budget 2012 (C-38) aura pour effet d’affaiblir plusieurs lois canadiennes en matière de protection, d’évaluation et d’acquisition de connaissances en l’environnement, en plus de limiter la capacité des citoyens et des organisations, dont la nôtre, de participer aux processus de consultation et d’évaluation des projets.

 

Vingt ans après Rio

Lors de la première conférence de Rio en 1992, vous avez vous même participé, à titre de ministre fédéral de l’environnement, aux efforts de la communauté internationale en faveur du rapprochement entre développement économique et protection de l’environnement. Vingt ans plus tard, malgré des avancées notables, les objectifs sont malheureusement loin d’être atteints, tel qu’en témoigne « Geo-5 », le dernier bilan quinquennal de l’état de la planète du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). Pour les auteurs, « Alors que les pressions humaines sur le système terrestre s’accélèrent, plusieurs seuils critiques […] sont sur le point d’être atteints ou ont été dépassés. » Ils estiment donc que « des changements abrupts et peut-être irréversibles dans les fonctions de la planète nécessaires à la vie sont susceptibles de se produire en ayant des conséquences néfastes importantes pour le bien-être humain ».

Vous en conviendrez, ce triste bilan appelle à un resserrement des mesures de protection de l’environnement, et non l’inverse. Or, avec une stratégie de développement axée uniquement sur les intérêts économiques à court terme, Ottawa prépare des lendemains difficiles aux Canadiens et Canadiennes. Nos riches écosystèmes ne pourront plus soutenir adéquatement ce développement aveugle alors que les dommages pour l’environnement coûtent très cher à long terme. Ces derniers jours, le déversement de pétrole dans la rivière Red Deer en Alberta nous rappelle à quel point il est légitime de s’inquiéter.

 

Le devoir du Québec

De toute évidence, les modifications législatives proposées dans le projet de loi C-38 auront des incidences fâcheuses à moyen et long terme. Elles risquent même de faire reculer le Québec, en compromettant les avancées notables qui ont été faites chez nous en matière de protection de l’environnement au cours des dernières années, notamment dans la lutte contre les changements climatiques. Vous avez donc la responsabilité, monsieur le Premier ministre, de déployer tous les moyens à votre disposition pour faire obstacle à l’adoption de ce projet.

En cas d’échec, j’invite le gouvernement du Québec à planifier un vaste chantier visant à récupérer les champs de compétences qui seront alors négligés ou abandonnés par le fédéral, ou à intégrer dans son cadre légal de nouvelles dispositions pour compenser ces pertes. Il pourrait notamment remettre sur pied la Table ronde québécoise sur l’environnement et l’économie, qui, de 1988 à 1997, avait jeté les bases d’une réflexion approfondie sur les possibilités de développement durable dans différents domaines comme l’agriculture, l’industrie, la forêt et le tourisme. Elle pourrait en outre conseiller le gouvernement du Québec dans la mise en œuvre de la loi sur le développement durable.

Lors de votre second séjour au Brésil, qui s’amorcera ces jours-ci dans le cadre de Rio+20, vous avez l’occasion de démontrer que l’implication du Québec en faveur du développement durable et de la protection de l’environnement n’a réellement pas de frontières.

 

Source: Monique Laberge, présidente du RNCREQ

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