L’industrie minière canadienne convoquée au Tribunal des peuples

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Par Élise Prioleau


Le Tribunal permanent des peuples (TPP), un organisme international de justice alternative et civile, est convoqué au printemps 2013 à Montréal. Il débattra des conséquences des activités des compagnies minières canadiennes dans le monde en matière de violation des droits humains. L’initiative lancée par Justice transnationales extractives (JUSTE) vise à dénoncer certaines pratiques industrielles qui auraient l’effet de détériorer la qualité de vie des citoyens des régions concernées.

« On voit un peu partout à travers le monde des compagnies d’exploitation minière transformer de manière irréversible des lieux naturels, parfois au détriment du bien-être des populations locales et malgré leur désaccord », explique Marie-Ève Campbell, membre de JUSTE.

« Nous voulons sensibiliser le public canadien et international à la violation des droits humains perpétrés par plusieurs entreprises d’extraction minières, aussi bien dans le cadre du Plan Nord québécois, que dans plusieurs pays d’Amérique du Sud et d’Afrique. »

Lors des séances du tribunal, ces trois zones géographiques seront représentées par un cas litigieux qui oppose une compagnie minière et une population locale. Un jury composé d’observateurs internationaux, de juristes et de chercheurs, entendra les trois causes avant de rendre un jugement conforme aux principes du droit international.

L’organisme JUSTE milite pour l’établissement de lois internationales qui permettraient d’encadrer les activités d’exploitation des ressources naturelles à travers le monde. Des lois plus sévères pour mieux protéger l’environnement, mais aussi les humains qui y vivent.

 

Des conséquences socio-environnementales multiples

Les substances toxiques rejetées dans l’eau et l’air, la pollution sonore et la modification durable de l’aspect d’un territoire, font parties des conséquences socio-environnementales souvent associées aux projets miniers.

Il y a des risques concernant la santé, mais aussi des effets économiques à long terme, observe Blaise Pentel, membre de la Coalition québécoise sur les impacts socio-environnementaux des transnationales en Amérique latine (QUISETAL), un regroupement d’organismes qui participera au tribunal.

« Lorsqu’un mégaprojet minier s’implante dans une ville ou un village, on constate un appauvrissement systématique de la population locale », rapporte-t-il. C’est le cas de la ville de Sept-Îles au Québec, où l’afflux de travailleurs a généré depuis deux ans une augmentation très rapide du coût des loyers, dont les prix sont passés du simple au double. La hausse des prix a par ailleurs fait grimper le nombre de demandes d’hébergement dans les refuges, comme l’a indiqué le journal Le Soleil.

 

Violation des droits humains

« Un peu partout sur la planète des projets d’exploitation des ressources naturelles sont responsables d’atteintes claires à plusieurs droits économiques, sociaux, culturels reconnus », soutient Sylvie Paquerot, professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa, dans un récent bulletin de la Ligue des droits et libertés.

Dans certains pays, les atteintes aux droits perpétrés dans le cadre de litiges environnementaux sont beaucoup plus graves : détentions arbitraires, déni de droits judiciaires, déplacements forcés. « Ils sont souvent le lot des citoyens et des citoyennes qui questionnent ou contestent les décisions politiques et économiques qui ont un impact sur l’environnement », affirme-t-elle.

 

Des recours juridiques inefficaces

Malgré la généralisation des mécanismes de consultation mis en place à la suite du Sommet de la Terre de Rio en 1992, les citoyens disposent de très peu de recours pour faire valoir leurs droits lorsqu’ils se sentent floués, poursuit Sylvie Paquerot. « Les intérêts contradictoires sous-jacents aux enjeux environnementaux [ceux des entreprises et des citoyens]s’affrontent dans un rapport de force qui demeure très inégal », déplore-t-elle.

Le cas de la mine Marlin de l’entreprise Barrick Gold au Guatemala est un cas illustre. En 2008, la Commission pastorale et écologique de San Marcos révélait l’existence de résidus de fer, d’aluminium, de magnésium et d’arsenic dans une rivière située dans le secteur de la mine. En 2010, la Commission interaméricaine des droits de l’homme demandait, sans succès, au gouvernement guatémaltèque de suspendre les opérations de la mine pour cause d’effets nocifs sur l’environnement.

À la suite de la visite d’un agent de l’ONU venu enquêter sur les activités de la mine, une militante fut menacée verbalement. Une deuxième, attaquée par balle, fut sérieusement blessée. La mine Marlin est toujours en activité.

 

Source: GaïaPresse

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