Reconstruire après les inondations en Montérégie: un décret discutable ?

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Par Marie-Eve Cloutier


Mots-clés : Inondation, aménagement du territoire, décret de Z.I.S, Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, Politique de protection des rives, du littoral et des plaines inondables

 

Image: Wikipedia

Il y a un an, la région de la Montérégie connaissait ses pires inondations alors que la crue des eaux de la rivière Richelieu atteignait un niveau record de 30,7 m. L’évènement a été qualifié de pire catastrophe naturelle ayant touché le Québec depuis la crue de la rivière Saguenay en 1996.

Face à cette situation d’urgence, le Conseil des ministres a adopté un décret autorisant la réfection ou la reconstruction d’une habitation domiciliaire détruite, devenue dangereuse ou ayant perdu au moins 50 % de sa valeur en zone inondable 0-20 ans. « Ce décret est loin d’avoir résolu le problème puisque les sinistrés ne sont pas hors de danger », a affirmé Renée Rouleau, lors d’une conférence dans le cadre des Vendredis GaïaPresse, tenue en juin.

 

À l’encontre des orientations gouvernementales

Le gouvernement a le pouvoir de créer une zone d’intervention spéciale (Z.I.S) par décret en utilisant l’article 158 de la Loi sur l’aménagement de l’urbanisme (L.A.U.). Il s’agit néanmoins d’un mécanisme règlementaire rarement utilisé, selon la bachelière en Science de l'urbanisme de l'Université de Montréal.

De plus, la Z.I.S. doit être créée dans le but de résoudre un problème d'aménagement ou d'environnement dont l'urgence ou la gravité justifie, de l'avis du gouvernement, une intervention. Cependant, le décret ne doit pas aller à l’encontre de toute autre loi.

Pourtant, en 1987, le gouvernement adoptait sa première Politique de protectiondes rives, du littoral et des plaines inondables et la L.A.U oblige les municipalités à respecter cette Politique dans leur règlementation. « Il n’est pas permis de construire dans la zone inondable 0-20 ans, car ce faisant, on ne protège pas l’environnement », a rappelé Renée Rouleau.

 

Intérêts particuliers et inéquité

Après un sinistre d’envergure, on doit normalement s’affairer à déplacer les sinistrés hors de danger. Dans le cas des inondations en Montérégie, par le décret, certains sinistrés ont obtenu la permission de demeurer dans des zones à fort risque qu’est la zone 0-20 ans, où une inondation de grand courant est susceptible de se produire, selon les probabilités, tous les 20 ans.

« On peut se demander quel était l’intérêt du gouvernement dans cette affaire », énonce Renée Rouleau. « Beaucoup de pression est sans doute venue de la part des municipalités touchées, puisque leurs revenus sont basés sur la valeur fiscale des propriétés sur leur territoire », a-t-elle ajouté.

Sans compter que le gouvernement agit de manière inéquitable : « Certains Québécois ont le privilège de reconstruire leur maison dans une zone où les habitants des autres régions n’y ont guère droit. Cela a créé un sérieux précédent. À l’avenir, les normes en matière de protection des lacs risquent d’être plus difficiles à faire respecter », a conclu l’urbaniste.

 
Source: GaïaPresse

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