La consigne doit-elle aller vers les centres de dépôt?

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Par Jennifer Blanchette


 

Les panelistes dans l'ordre habituel: Karel Ménard, directeur général du FCQGED, Richard Messier, vice-président chez Léger Stratégie conseil, Pierre Batellier, coordonnateur développement durable à HEC Montréal et Serge Lareault, directeur général du magazine L'Itinéraire. (Photo de Jennifer Blanchette)

Mots-clés: consigne, colloque, Pro-consigne, centres de dépôts, développement social, financement

 

Pour améliorer le système de consignation publique au Québec, il faut développer des centres de dépôts à divers endroits de la province. C’est la solution citée à de nombreuses reprises par les intervenants invités au colloque La consigne : Outil de développement social.

Lors du panel de discussion présenté en fin de journée, Richard Messier, autrefois affecté à la préparation de la première loi sur la consigne en 1981, n’a pas hésité à remettre de l’avant son idée de centres de récupération et de remboursement de la consigne.

 « La seule façon de pouvoir profiter au maximum de ce que la consigne peut offrir, c’est d’abord et avant tout d’avoir des centres de dépôts. Il faut sortir la consigne des épiceries et des dépanneurs. C’est l’unique moyen d’apprécier pleinement l’aspect social de la consigne », soutient-il.

Pour monsieur Messier, ce projet, développé en 1996, ne peut fonctionner et être rentable qu’à condition d’élargir l’ensemble des produits consignés. À l’époque, plus de 5 000 items étaient visés par l’élargissement. « Il faut sortir ces produits de la collecte sélective et leur apposer un dépôt. »

Il avance toutefois qu’il devient urgent d’agir puisqu’ à ce jour, les municipalités ont investi des centaines de millions de dollars pour développer la collecte sélective. Chaque montant déboursé rend plus difficile l’élargissement de la consigne publique.

Du côté des propriétaires de marché d’alimentation, l’idée du centre de dépôt semblait les satisfaire, les supermarchés n’ayant pas la capacité physique et les moyens financiers d’absorber les impacts d’une éventuelle hausse/élargissement de la consigne.

La propriétaire du IGA de l’Outaouais a d’ailleurs exprimé son intérêt en utilisant l’aspect social de la question, à savoir si les centres de dépôts seraient localisés près des établissements d’alimentation afin que les plus démunis continuent d’y avoir accès facilement. Une façon intéressante de sous-entendre que cette proximité permettrait aux supermarchés de déléguer aux centres leurs responsabilités envers le système de consigne.

 

La consigne comme outil de levée de fonds

Bon nombre d’organismes à but non-lucratif ou d’associations financent leur projet grâce à la consigne de 5 cents. L’abolir reviendrait donc à priver ces groupes d’une source de revenus plus qu’appréciable et accessible.

Lors de la présentation Donnez vos vides pour une bonne cause, la directrice des communications de Consignéco, Pascale Demers, a souligné que beaucoup de cannettes consignées n’étaient pas retournées. 390 millions pour être exact.

« Ces millions de cannette non retournées représentent une valeur de près de 21 millions. Plusieurs organismes misent sur le potentiel social de la consigne comme source de financement complémentaire. Un des meilleurs exemple est celui de l’organisme américain Cans for habitat qui a obtenu assez de fonds, grâce à la consigne, pour construire 95 nouvelles maisons et y  loger des familles démunies » tient-elle à rappeler.

D’après une étude réalisée par Consignéco, la collecte de cannettes bien organisée pour rapporter jusqu’à 40 dollars de l’heure. Un montant qui fait la différence selon madame Demers.

Un autre intervenant ramène ses dons à un niveau encore plus individuel. « J’habite dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve et maintenant, plutôt que de rapporter mes contenants, je les laisse sur mon balcon. Pour de nombreux démunis, la consigne est leur filet social avant de tomber dans la rue. Peu importe les changements apportés au système de consignation, il faudra laisser une place pour développer un projet d’économie sociale » avance Serge Lareault, directeur général du magazine L’Itinéraire.

 

Un aspect social difficile à maintenir

Bien que les impacts sociaux de la consigne étaient le thème du colloque, les conversations retournaient fréquemment vers les préoccupations économiques et environnementales de l’enjeu.

Si la majorité des participants se disaient en faveur de la modernisation du plan de consigne au Québec, d’autres y étaient plus réticents. Résultat : des échanges parfois musclés entre intervenants et participants lors de la période de question.

Ce fut le cas, durant le panel, lorsque la représentante d’Éco Entreprises Québec questionna à plusieurs reprises le directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets (FCQGED) sur les gains environnementaux du transfert de la collecte sélective à la consigne.

« Il y aura beaucoup plus de contenants récupérés. Au lieu d’avoir des contenants qui s’en vont au dépotoir, ils prendront le chemin du recycleur/revalorisateur. Pour ce qui est de la traçabilité des contenants en centre de tri, je n’en ai aucune idée parce que les chiffres ne sont pas disponibles. Que les centre de tri privés mettent leur chiffres sur la table et là nous pourront commencer à discuter », martèle monsieur Karel Ménard.

Malgré ces quelques tensions, le reste de la journée s’est bien déroulée. Les oppositions exprimées par les personnes en faveur de la collecte sélective ont d’ailleurs contribué à augmenter la qualité des échanges et à examiner le système de consigne publique sous d’autres aspects. Environ 70 personnes étaient présentes lors du colloque.

 

Source: GaĩaPresse

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