Le design urbain pour penser la ville durable

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Par Eugénie Emond


Photo de Retis – Flickr

Mots-clés : design urbain, institut EDS, Girba, CRAD, ville durable

 

Contrer l’étalement urbain par la construction de bungalows bi-générationnels, rendre piétonniers les espaces commerciaux de banlieue, donner une autre vocation à des carrefours autoroutiers et reléguer la voiture au rang d’invitée dans la rue, voilà autant de déclinaisons de la ville durable.

Si la pertinence de ces cités n’est plus à défendre, son instauration se fait plus souvent qu’autrement à pas de tortue et sans vraiment de participation et de consultation citoyenne significative.

Cette ville de demain s’imagine aujourd’hui dans les universités où s’est développé le design urbain, un champ de pratique à cheval entre l’urbanisme et l’architecture et dont Geneviève Vachon, architecte et professeure-chercheure à l’École d’architecture de l’Université Laval a fait l’apologie lors d’une conférence organisée par l’Institut EDS en environnement, développement et société et le CRAD, le Centre de recherche en aménagement et développement à l’Université Laval le 30 janvier dernier.

 

Fabriquer l’espace public collectif

« Le design urbain est un jeune champ de compétence, même si planifier des villes est une pratique immémoriale », explique Geneviève Vachon qui ajoute que « la mondialisation a remodelé le réseau des villes. Le monde s'urbanise bien loin des images et des références traditionnelles. Il convient d'envisager de nouveaux outils. Le design urbain pourrait se révéler un des plus performants. »

Le design urbain est une discipline qui commande des savoirs et des compétences spécifiques sur la ville et qui doit considérer autant ses dimensions techniques que socioculturelles et environnementales. Les projets de design urbain doivent être opérationnels et orientés vers le futur après avoir été initiés d’abord pour résoudre un problème. « Ce sont les relations entre les objets, les bâtiments, les espaces publics qui intéresse particulièrement le designer urbain. Les entredeux également, pleins comme vides, à qui il faut souvent redonner une fonction », affirme la chercheure qui donne à titre d’exemple les non-lieux comme les autoroutes ou les terrains en friche sous les pylônes.

 

Plus d’une corde à son arc

Contrairement à l’architecte, le designer urbain doit composer avec différents intervenants : propriétaires, élus, fonctionnaires, groupes d’intérêt, pour ne nommer que ceux-là. Or le développement urbain durable demande également de tenir compte de nombreuses compétences et champs de pratique comme les sciences de l’environnement, la sociologie, le génie, la foresterie et la climatologie. La collaboration et l’interdisciplinarité deviennent donc la carte maîtresse du designer urbain dont la pratique est tout sauf linéaire.

C’est ce que prônent notamment les chercheurs membres du GIRBa (Groupe interdisciplinaire de recherche sur les banlieues) de l’Université Laval dont Geneviève Vachon fait partie. Ici, étudiants, chercheurs issus de différentes disciplines, architectes, urbanistes et designers collaborent ensemble depuis 20 ans en plus de partager leurs idées avec des acteurs du milieu. Véritable laboratoire de la ville durale, on y réfléchit l’espace urbain en l’adaptant, entre autres, aux changements climatiques et au vieillissement de la population. Les suggestions faites par le GIRBa ont d’ailleurs mené, dans certains cas, à des actions concrètes comme à un assouplissement des règlements de zonage dans une municipalité pour y permettre la construction d’un deuxième étage à des bungalows à vocation bi-générationnelle.

 

Avec le temps…

Geneviève Vachon croit que le temps demeure sa principale alliée pour le moment dans l’implantation de la ville durable. « On commence dans les domaines de pratique à s’entendre sur les manières dont ça peut prendre place avec, par exemple, des bâtiments verts, la certification LEED, les écoquartiers, mais ça prend du temps avant que ce ne soit ancré dans nos pratiques quotidiennes d’architecture, d’urbanisme et de design. » Sans oublier qu’une ville se fabrique avec la participation des citoyens. Le designer urbain doit considérer leur expertise au même titre que tout autre intervenant, ce qui n’est pas le cas présentement dans la majorité des villes québécoises quand vient le temps d’élaborer des plans d’urbanisme.

En attendant, le designer urbain est devenu un métier en soi et les diplômés de l’Université Laval infiltrent désormais différents domaines de la planification urbaine. La conférencière souhaite d’ailleurs que les collaborations avec le milieu initiées au GIRBa créent une nécessité, afin que les villes réclament ce genre de compétence.

 

Et le tramway dans tout ça?

Cette sixième et dernière conférence sur la durabilité des villes s’est terminée par une période de questions où l’implantation d’un tramway à Québec, symbole du transport en commun durable, a été entre autre questionné.

Si Geneviève Vachon en reconnait les avantages, ne serait-ce qu’au niveau du confort urbain pour une population qui est vieillissante, elle tempère également : « Il y a bien de la banlieue à réaménager, bien des croûtes à manger avant ou en même temps qu’on se questionne sur le tram. Juste boucher les trous, par exemple, qui existent présentement dans le tissu urbain de Québec et donner d’autres vocations à ces non lieux. »

 

Source: GaïaPresse

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