« La nouvelle politique de souveraineté alimentaire favorisera une agriculture à deux vitesses » – Nature Québec

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Photo de Simon Lexton – Flickr

Plus de 5 ans après la publication du rapport Pronovost qui proposait une vaste réforme de l’agriculture au Québec, le gouvernement du Québec vient de lancer sa Politique de souveraineté alimentaire qui ne répond qu’à moitié aux défis soulevés par la Commission. En fait, selon Christian Simard directeur général de Nature Québec « La Politique annoncée favorisera l’émergence d’une agriculture à deux vitesses où se perpétueront des pratiques dommageables pour l’environnement naturel tout en tentant d’implanter, à la marge, un axe de développement durable pour définir l’agriculture de demain ».  

Bien que contenant des éléments intéressants en favorisant une plus grande consommation au Québec des produits issus de notre agriculture et des mesures visant à limiter la spéculation foncière, la politique annoncée est une réforme inachevée qui fera cohabiter des pratiques incohérentes sur le plan de la protection de l’environnement et des ressources.

En fait selon l’organisme, il aurait fallu placer l’écoconditionnalité (conditionner l’aide de l’État aux meilleures pratiques agricoles et environnementales) au cœur de la nouvelle Politique et non en périphérie telle que proposée. « Il y va de la crédibilité de la démarche gouvernementale et, au-delà, de la mise en marché de produits distinctifs reconnus, eu égard à la qualité de l’environnement », affirme pour sa part l’agronome Christine Gingras, directrice adjointe de Nature Québec.

Comme le gouvernement soutient l’agriculture en y investissant plus de 1 milliard $ de fonds publics par année, Nature Québec avait recommandé, à l’instar de Pronovost, « d’utiliser ce puissant levier pour soutenir une agriculture qui mette en priorité la santé des écosystèmes qui la soutiennent, qui occupe le territoire avec des fermes de taille variable, et qui remplisse une diversité de fonctions… ».

Dans la politique annoncée, le développement durable n’est que le 4e axe retenu. « En fait on tente de faire cohabiter un développement durable avec un développement qui ne l’est pas. On craint que les ressources soient davantage orientées vers les modes de production non durables », selon Christian Simard.

Par le passé, le soutien massif à l’agriculture a été concentré sur l’aide à la production, même si celle-ci était souvent largement déficitaire et problématique sur le plan de l’environnement. Il faut maintenant soutenir une agriculture multifonctionnelle par le biais de contrats où le producteur, en plus de produire des denrées alimentaires, est reconnu et rémunéré comme intendant de milieux naturels, ainsi qu’un producteur de biens et de services environnementaux (BSE).

 

L’environnement en milieu agricole : une situation loin d’être réglée

Un des postulats exprimés dans la nouvelle Politique, c’est que l’essentiel en environnement a été fait et qu’il suffit maintenant de se concentrer sur des produits distinctifs, qu’il suffira de bien mettre en marché. Pourtant, le phosphore, malgré des progrès réels, est encore présent à des concentrations préoccupantes en plusieurs endroits. Sept des huit rivières qui présentent à leur embouchure des eaux de mauvaise ou de très mauvaise qualité sont des cours d’eau en milieu agricole (Yamaska, Mascouche, Châteauguay…). La concentration de pesticides en milieu agricole est toujours considérée comme préoccupante. Les concentrations d’atrazine, de métolachlore et de dicamba ont diminué, mais le glyphosate, associé aux OGM, est en augmentation. Dans un cours d’eau longeant des productions maraîchères, on a identifié 36 pesticides, dont 15 dépassaient les critères pour la protection de la vie aquatique.

 

Ménager la chèvre et le chou

Plus de 5 ans après la publication du rapport Pronovost, on s’attendait à une Politique agricole plus large et plus complète. On a mis de côté de larges pans des recommandations des rapports Pronovost, Saint-Pierre (financement) et Ouimet (occupation du territoire) dans la Politique de souveraineté alimentaire pour ne pas susciter trop de réactions dans les milieux agricoles plus conservateurs. « On a tenté de ménager la chèvre et le chou, ce qui risque de nuire à l’efficacité de la nouvelle politique. Toutefois, cette politique reste à définir dans ses moyens d’action et ses programmes, et à Nature Québec nous entendons bien y contribuer de manière constructive » de conclure Christian Simard.

 

Source: Nature Québec

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