Éviter le pire pour les pays en développement

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Par Catherine Gauthier


Mots-clés : pertes et dommages, climat, GIEC, AOSIS, COP19, Varsovie, adaptation, pays en développement, états insulaires, Afrique, Chine, SBI, Nigéria, financement

 

Les sécheresses sont une des conséquences des changements climatiques (Tim J. Keegan, 2007)

Selon une nouvelle série d’études publiées dans le International Journal of Global Warming, les effets des changements climatiques menacent de plus en plus les moyens de subsistance de certaines populations. Plus d’une dizaine de pays présenteraient d’ailleurs un niveau de risque jugé extrême.

Parmi ces pays, on retrouve le Bangladesh, la Guinée-Bissau, la Sierra Leone, Haïti, le Soudan du Sud, le Nigéria, la République démocratique du Congo, le Cambodge, les Philippines et l’Éthiopie (Maplecroft, 2013). Les pays en développement d’Afrique et d’Asie principalement sont très vulnérables au réchauffement planétaire.

Les études démontrent notamment que bien des efforts pour s’adapter aux inondations récurrentes avaient été vains. Dans d’autres cas, le cycle des sécheresses se poursuit et réduit considérablement la taille des troupeaux. Malgré des mesures pour s’adapter aux changements climatiques, ceux-ci viennent gruger une grande part du budget familial. Autre signe d’une capacité d’adaptation limitée, plusieurs familles ont dû réduire le nombre de repas ou la taille des portions.

 

Une incapacité à s’adapter

Les pertes et dommages sont une nouvelle réalité pour les pays en développement. Même si l’expression « pertes et dommages » ne fait pas l’unanimité, elle désigne généralement « une série de préjudices subits dans les pays en développement ne pouvant pas être évités par des efforts d’atténuation ou d’adaptation au changement climatique. (IRIN, 2013) »

Les pertes et dommages associés aux changements climatiques sont appelés à s’amplifier au cours des prochaines années. Le risque de voir le réchauffement planétaire franchir un point de non-retour laisse également craindre une accélération abrupte et non-linéaire des conséquences liées au phénomène.

Les Palaos (SIDS, 2013)

De Cancún à Varsovie

À l’occasion de la Conférence de Cancún en 2010, les parties ont mis sur papier un programme de travail pour évaluer diverses approches. L’année dernière, à Doha, les pays ont parlé de la possibilité de discuter d’un mécanisme lors de la conférence qui se déroule présentement à Varsovie.

Les modalités d’un mécanisme pour répondre aux pertes et aux dommages sont à l’agenda de la COP19. Avec les impacts dévastateurs du typhon Haiyan aux Philippines, le sentiment d’urgence est bien présent à Varsovie. Alicia llaga, négociatrice des Philippines, a dit apprécié les élans de sympathies venus du monde entier. Elle espère toutefois que ces sympathies se transformeront en quelque chose de plus réel, de plus utile.

 

Un mécanisme international ambitieux sur la table

Les pays en développement étant les plus vulnérables aux conséquences des changements climatiques, ils ont avancé un cadre institutionnel ambitieux. Le G77 et la Chine, appuyés par les États africains, les pays les moins avancés et l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS, de l’anglais Alliance of Small Island States), ont déposé une soumission auprès de l’organe subsidiaire de mise en œuvre (SBI, de l’anglais Subsidiary Body for Implementation), dans laquelle ils exposent leurs attentes.

La rencontre du groupe contact sur les pertes et dommages sous le SBI était fermée aux observateurs, mais le texte soumis a été partagé à plusieurs membres de la société civile. Il s’agit d’un texte ambitieux, mais qui pourrait s’affaiblir alors qu’il fera l’objet de discussions informelles.

 

Le Nigéria brille par son absence

Alors que le Nigéria figure parmi les pays les plus vulnérables aux changements climatiques, il est absent des discussions à Varsovie. En effet, l’État le plus populeux d’Afrique n’a aucun négociateur pour le représenter à la COP19. Certains soulignent d’ailleurs qu’il est un important producteur de combustibles fossiles.

À cet effet, un représentant d’une ONG australienne a lancé : « Si vous n’êtes pas à table, vous serez sur le menu ! »

 

Inondation dans la République de Vanuatu (Meredith James Johnstone, 2004)

De fortes divergences entourant le financement

Même si plusieurs idées sont sur la table quant au mécanisme pour répondre aux pertes et aux dommages, une question cruciale demeure en suspens : celle du financement. Mercredi, les questions les plus contentieuses entre les parties étaient celles entourant le financement à long terme.

Sous la 19e Conférence des Parties, les Philippines ont exprimé au nom du groupe du G77 l’importance de clarifier la promesse des 100 milliards de dollars par année à compter de 2020. Les Philippines ont aussi exhorté les parties à accroître le financement accéléré qui se terminait en 2012. Ainsi, la question du financement faisait consensus au sein G77.

Dans les débats, les États-Unis ont déclaré officiellement qu’ils n’étaient pas prêts à s’engager pour un financement nouveau à Varsovie. Cette déclaration n’a pas manqué de soulever l’opposition du G77.

 

Éviter le pire

Selon Sven Harmeling, coordinateur de la sensibilisation au changement climatique de l’ONG CARE International, de grandes pertes comme la disparition d’États insulaires peuvent encore être évitées en mettant en place « dès maintenant [des programmes]ambitieux d’atténuation ».

Or, les discussions se heurtent à de fortes divergences entre les parties. Alors que les questions d’adaptation ne sont pas encore résolues, il faut passer à des stratégies ambitieuses et efficaces sur les pertes et les dommages. Pour Koko Warner, la directrice scientifique de « Loss and Damage in Vulnerable Countries Initiative », il n’est plus question de « donner sa chance à l’adaptation ».

Les études de l’International Journal of Global Warming mettent de l’avant des stratégies de gestion des risques. Toutefois, les assurances ne permettront pas de couvrir des pertes telles que la disparition d’un pays, et de la diversité biologique et culturelle.

Ultimement, plusieurs craignent de devoir déplacer certaines populations d’États insulaires comme les Maldives ou les Palaos.

 

Source: GaïaPresse

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