Biométhanisation : des investissements colossaux pour des effets négligeables sur les GES

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Selon un nouveau rapport de recherche de l’IRÉC sur le Programme de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage (PTMOBC), il appert que les investissements colossaux de 650 millions de dollars auront un effet négligeable sur la réduction des gaz à effet de serre, ce qui est pourtant l’objectif central du programme. « L’analyse de quatre projets pour lesquels les données étaient disponibles permet d’établir qu’aucun de ces projets ne s’approche de l’effet d’évitement combiné entraîné par le remplacement de l’enfouissement non performant et de la substitution de carburant fossile alors que trois des quatre projets apportent tout juste un peu plus de réduction que le scénario de référence. Ainsi, l’analyse de ces trois projets qui vont chercher 119 M$ en subventions sur les 650 M$ prévus montre qu’ils auront comme effet de réduire de 3/100 de 1 % les émissions québécoises totales », ont expliqué Charles Provost et Robert Laplante et Noël Fagoaga, auteurs de ce rapport de recherche de l’IRÉC. 

De plus, le rapport constate que 77 % des émissions de GES proviennent de sites qui ne sont plus en activité et sur lesquels le PTMOBC n’aura aucun effet, car les projets qui lui sont soumis visent la valorisation de la matière organique à enfouir et non celle qui est déjà enfouie. « C’est tout de même extraordinaire de prévoir engager près d’un milliard de dollars d’investissements dans un programme qui, non seulement ne résout pas les problèmes actuels ou appréhendés, mais ne résout pas un problème majeur issu des pratiques antérieures et qui plombe toujours notre bilan carbone! », ont indiqué les chercheurs. 

Les auteurs ont aussi noté que le Cadre normatif du PTMOBC n’établit pas de lien entre les moyens (les subventions accordées) et les fins (la lutte au GES). « Le montant de la subvention n’a tout simplement aucun lien avec l’effet d’évitement recherché, il est uniquement fonction du tonnage traité par l’un ou l’autre des deux types d’équipement admissible, soit la biométhanisation, soit le compostage. Or, dans les deux cas, le pourcentage d’évitement ou de réduction affiché par les projets reste très faible », ont-ils dit. 

 

Embrouillamini sur l’engagement

L’analyse des divers documents officiels montre enfin que l’élimination de l’enfouissement de la matière organique ne constitue pas une cible, mais un résultat souhaité à la suite de la mise en place d’un programme de soutien au financement des infrastructures à même les redevances d’enfouissement. « On tourne en rond : la Politique renvoie à un plan d’action qui renvoie à une stratégie qui nous ramène à “l’annonce” d’une intention de bannissement total qui elle-même ne se retrouve pas dans la Politique, mais que le Plan d’action 2011-2015 évoque sans donner de détails. Cet embrouillamini ne permet guère de considérer ce programme comme un engagement ferme à faire la lutte aux gaz à effet de serre et à valoriser la matière organique », se sont-ils interrogés. 

 

Du flou dans les calculs de l’eau dans le gaz

Cette nouvelle analyse de l’IRÉC du Programme de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage suit celle publiée à l’automne 2013 Du flou dans les calculs de l’eau dans le gaz. Charles Provost et Robert Laplante avaient alors démontré que la production de gaz qui peut découler des opérations de ce programme est négligeable. « Le potentiel véritable se situe vraisemblablement autour de 1 % de la consommation annuelle de gaz naturel du Québec, ou encore 0,16 % de la consommation énergétique totale du Québec, avaient-ils précisé. Une filière de biométhanisation municipale des matières organiques putrescibles aurait donc un effet marginal sur le bilan énergétique québécois. » 

Qui plus est, ils avaient démontré que le prix qu’il est possible d’obtenir pour le gaz produit est et demeurera « très bas », en raison de la production importante de gaz de schiste aux États-Unis. « Impossible, donc, d’envisager de tirer des revenus intéressants de ce biométhane », avaient-ils conclu. 

 

Une révision majeure s’impose

Pour assurer le succès de la Politique de gestion des matières résiduelles, les chercheurs de l’IRÉC demandent une révision majeure du PTMOBC. « Au moment où les projets ne sont pas encore en démarrage, il faut s’imposer un réexamen, ont-ils résumé. Dans sa forme actuelle, le programme réduit la possibilité pour les municipalités et l’ensemble des acteurs concernés de faire des choix adaptés à leur situation et les expose à des risques financiers évitables. Il faut reprendre les choses dans le bon ordre et faire primer les finalités sur les moyens. Il est encore temps de le faire ». 

L’étude de l’IRÉC publiée aujourd’hui s’intitule Évaluation des effets du Programme de traitement de la matière organique par biométhanisation et compostage sur la réduction des GES. Pour connaître les résultats des travaux de l’IRÉC, voir www.irec.net

Consultez le rapport ICI.
 

Source: IRÉC

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