Constructions durables, où en sommes-nous?

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Par Eugénie Emond


 

Josée Lupien, présidente du CBDCa-Qc. Source: CBDCa-Qc

Le bâtiment durable québécois est-il à la hauteur de ce qu’il pourrait être?

Il y a dix ans, la Section du Québec du Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCa-Qc) était créée afin de repenser le secteur du bâtiment, grand générateur de gaz à effet de serre et de déchets issus de la construction et de la démolition.  Certifications LEED et autres réalisations plus tard, ses membres rêvent aujourd’hui de carboneutralité.  Une visée partagée par le Programme des nations-unies pour l’Environnement – Initiative Bâtiments Durables et Climat (UNEP-SBCI) qui proposait un congrès réunissant les deux entités les 12 et 13 mai dernier à Québec.

 

L’architecture humaniste au service de l’édifice écologique

«Le développement durable, c’est aussi rendre les gens heureux», soulève l’architecte et conférencier invité Pierre Thibault. Car si l’édifice écologique a connu des avancées importantes, il devrait également offrir un supplément d’âme, s’intégrer à son environnement et permettre à son architecture de «participer à notre compréhension du monde». CHSLD, écoles et autres immeubles publics, devraient ainsi favoriser les relations humaines et offrir des lieux de contemplation plutôt «qu’un le pavillon de fin de vie situé au fond du stationnement», illustre-t-il.

 

Dix années de mobilisation

N’empêche qu’en dix ans, les connaissances se sont développées et échangées. La certification LEED, aujourd’hui présente dans une trentaine de pays, a aussi fait son chemin dans la tête des Québécois. «On a, au fil des ans, démystifié ce qu’est le bâtiment durable et on s’est fait un devoir de montrer les bonnes pratiques», soutient Josée Lupien, présidente de la Section du Québec du CBDCa qui compte 650 membres. Un organisme qu’elle considère aujourd’hui comme un véritable agent de changement.

Pierre Thibault: architecte. Source: CBDCa-Qc

Et si toutes les nouvelles constructions publiques se devaient d’être écologiques?

La durabilité n’est toutefois pas encore un passage obligé pour tout ce qui s’érige pour l’État au Québec. Il y a bien quelques exceptions comme la Ville de Montréal qui a adopté en 2009 une Politique de développement durable pour ses édifices, mais ça n’est pas partout.  «On a atteint une limite, il faut mobiliser les donneurs d’ouvrage, les municipalités et les gouvernements pour que ça devienne un engagement», insiste Mme Lupien. Un souhait en partie réalisé par différentes mesures comme l’interdiction d’envoyer du bois au site d’enfouissement en vigueur cette année.

 

Vers la neutralité climatique

La carboneutralité, un concept qui supplante peu à peu celui de la durabilité, occupait une grande place à ce congrès. «On va regarder tout le cycle de vie du bâtiment en soit», explique Mme Lupien. L’érection d’un immeuble ayant une forte empreinte écologique, de l’extraction des matières premières à sa démolition, une compensation des émissions de gaz à effet de serre est souhaitable. Mais avant de penser à compenser pour les énergies produites, le Québec a encore des devoirs à faire du côté de l’efficacité énergétique. «On n’en n’a pas conscience avec les coûts bas qu’on a», constate-t-elle.

 

Un talent sous-utilisé

La présidente rappelle également que le CBDCa-Qc a permis la création de nouveaux métiers dans le secteur de la construction. «Des jeunes sont aujourd’hui prêts à participer à l’élaboration d’un futur durable», assure-t-elle. Une affirmation que Pierre Thibault, qui enseigne également à l’École d’architecture l’Université Laval, voit d’un autre œil : «On a un talent fou au Québec (…) mais je recroise mes étudiants et ils sont tous déprimés». Thibault met en relief les lacunes des commandes publiques qui ne favorisent pas la créativité. « On s’est normalisé, rigidifié et ça a un impact, on le voit», affirme-t-il. Et de son point de vue, «notre environnement bâti n’est pas à la hauteur à laquelle on devrait s’attendre dans la société dans laquelle on est rendu».

 

Source: GaïaPresse

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