Pipeline Portland-Montréal: Une aide inespérée pour la Rive-Sud

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Sans le savoir, la ville de South Portland, au Maine, vient d’apporter un appui inestimable aux populations concernées par le pipeline Portland-Montréal, notamment à l’agglomération de Longueuil. En effet, South Portland, ville côtière de l’Atlantique, a récemment reconduit, jusqu’en novembre 2014, son moratoire adopté l’automne dernier pour empêcher la construction de toute nouvelle structure portuaire destinée au pétrole lourd des sables bitumineux et qui serait acheminé par le pipeline Portland-Montréal. Un décret permanent est à l’étude. « Nous n’avons aucun avantage à permettre le transit du pétrole le plus sale au monde dans notre communauté » a dit Tom Blake, un conseiller municipal, ancien maire de la Ville.

 

Mobilisation citoyenne vs dégâts permanents

« Les pétrolières veulent utiliser les infrastructures actuelles parce que leurs projets de nouveaux pipelines ne débloquent pas aussi rapidement qu’elles le voudraient », a affirmé Crystal Goodrich, porte-parole du comité citoyen local « Protect South Portland ».

L’industrie des sables bitumineux veut doubler sa production d’ici 2020 et la tripler d’ici 2035 grâce à l’exportation, pour vendre au prix international, supérieur au prix nord-américain. Les pipelines sont indispensables pour transporter massivement et rapidement le pétrole jusqu’aux villes portuaires.


L’agglomération de Longueuil concernée

Présentement, le pétrole conventionnel arrive par bateaux à Portland et remonte jusqu’à Montréal Est dans le pipeline qui parcourt trois États américains et la Montérégie Est. Il traverse de nombreux cours d’eau, comme la rivière Richelieu et le fleuve St-Laurent, sources d’approvisionnement en eau potable. Sur la Rive-Sud, les Villes de St-Basile-LeGrand, St-Bruno (parc du Mont St-Bruno), Ste-Julie et Boucherville (ville et parc des Îles) sont directement concernées. Longueuil, Brossard et Saint-Lambert le sont également, car elles devraient aussi payer la note en cas de déversement à St-Bruno ou à Boucherville, les dossiers environnementaux étant du ressort de l’agglomération.
 

Tentatives d’inversion

En 2008, la compagnie Pipelines Montréal Ltée a tenté d’inverser d’ouest en est le flux du pipeline pour y faire couler éventuellement le pétrole des sables bitumineux vers l’Atlantique. Le comité citoyen Environnement Saint-Césaire a sonné l’alerte sur les risques de déversements dus à l’inversion dans cette canalisation datant de 1950. La vétusté des tuyaux, l’augmentation de la pression nécessaire et la nature du pétrole « lourd » (plus acide, chaud, corrosif et visqueux que le pétrole brut conventionnel) sont en cause.

En 2011, un recours juridique citoyen gagné devant la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) a empêché la construction d’une station de pompage en zone agricole à Dunham, mettant un frein temporaire au projet d’inversion.

Aux États-Unis, l’inversion permettant le transit de pétrole lourd a fragilisé plusieurs conduites, causant des déversements. L’âge des canalisations et le nombre de déversements est directement proportionnel. Or, « le produit des sables bitumineux est très difficile à nettoyer, presque impossible » s’insurge Madame Goodrich, du comité citoyen de South Portland. Ce pétrole s’agglutine aux végétaux et coule fréquemment au fond des cours d’eau. Suite à la tragédie de Lac-Mégantic, du pétrole lourd est toujours au fond de la rivière Chaudière.

Depuis mars 2014, le mouvement citoyen Alerte Pétrole Rive-Sud sensibilise la population sur les impacts climatiques et les risques environnementaux du pétrole des sables bitumineux (transport par train et pipeline, etc).
alertepetrolerivesud@gmail.com

 

Des pétrolières propriétaires du pipeline

Malgré des noms évoquant des compagnies « régionales », des géants du pétrole impliqués dans les sables bitumineux sont propriétaires du pipeline Portland-Montréal: Shell, Imperial Oil (filiale d’ExxonMobil) et Suncor – qui possède aussi la raffinerie de Montréal Est. La compagnie Portland Pipelines Corporation, qui gère la portion américaine du pipeline, est une filiale à part entière de la compagnie Pipeline Montréal Ltée gérant la portion canadienne du pipeline. Elle est la propriété des trois pétrolières.

 

Écriteau de la compagnie Pipelines Montréal Ltée, à Boucherville

Le dernier pipeline « non inversé » vers l’Atlantique

Le 6 mars dernier, l’Office national de l’énergie autorisait la compagnie Enbridge à inverser le flux dans sa ligne 9B (Ontario / Montréal), lui permettant d’acheminer dorénavant le pétrole d’ouest en est, pour apporter le pétrole des sables bitumineux vers Montréal-Est. Le pipeline Portland-Montréal est ainsi le dernier d’une longue chaîne de pipelines, de l’Alberta jusqu’à l’Atlantique, à n’avoir toujours pas été inversé. Larry Wilson, président de la compagnie Portland Pipelines Corporation, a dit publiquement qu’il saisira à nouveau toute bonne occasion pour ranimer le projet d’inversion. Il a affirmé à plusieurs reprises qu’il serait heureux d’apporter le pétrole des sables bitumineux à South Portland.

Six communautés de la Californie songent à s’inspirer de la démarche de South Portland qui, sans surprise, soulève l’ire de l’Institut américain du pétrole regroupant plus de 500 compagnies de pétrole et de gaz. Bien des yeux (dont plusieurs de la Rive-Sud) continueront de se tourner vers cette petite ville de 25,000 habitants dans les prochains mois.

 

Source: Alerte Pétrole Rive-Sud 

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