Les opposants à la consigne répliquent au FCQGED

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Ce texte de Nathalie St-Pierre du Conseil canadien du commerce de détail est une réplique au texte publié par GaïaPresse, intitulé "Suivre la consigne".

 

D’abord, le débat n’oppose pas lobbyistes et écologistes, comme si les lobbyistes n’étaient pas préoccupés par les questions environnementales. En fait, les écologistes sont aussi des lobbyistes… et les partisans du transfert des contenants consignés vers la collecte sélective privilégient un mode différent qui est tout aussi valable, performant et efficace. La collecte sélective, qui vise autant la protection de l’environnement que la consigne, a démontré son utilité depuis de nombreuses années et est accessible à 99 % des foyers du Québec. Ainsi, ceux qui souhaitent miser sur la collecte sélective sont tout aussi environnementalistes que les « écologistes-lobbyistes ». Qui plus est, le transfert des contenants consignés vers la collecte sélective réduirait la facture que les consommateurs paient d’au moins 30 M$ annuellement. En effet, ces contenants, s’ils se retrouvaient dans la collecte sélective, augmenteraient les revenus (ventes des matières) réduisant les coûts totaux de la collecte sélective payés entièrement par les consommateurs. Alors que les coûts augmentent partout, il est impératif d’assurer la cohérence des démarches environnementales et par conséquent de privilégier un seul système efficace de récupération des contenants soit celui de la collecte sélective, afin de diminuer ce que les consommateurs doivent payer. 

Pourtant, à lire et à écouter M. Ménard, la collecte sélective serait inefficace, les bacs de récupération publiques inutiles et les « entreprises-lobbyistes », financées par le privé : « Ils sont financés par des entreprises privées. Il n’y a aucune donnée qui existe pour les bacs publics et on ne sait pas où vont les déchets et s’ils sont réellement recyclés. Il ne faut pas oublier que récupérer ne veut pas nécessairement dire recycler », ajoute le directeur général de la FCQGED ». Soulever de tels doutes sans fondement ne sert pas la cause ni ne protège l’environnement. La Table pour la récupération hors foyer a été mise en place en 2007 avec comme objectif de mettre en place un système performant de récupération des matières recyclables dans les circuits hors foyer (bacs publics), en s’appuyant sur la collecte sélective. Financée à 50 % par les détaillants, la Table pour la récupération hors foyer a atteint son objectif en 2012. En effet, de 2007 à 2012 le programme a financé plus de 7 000 équipements de récupération qui se déploient dorénavant dans les aires publiques municipales de toutes les régions du Québec et près de 4 000 restaurants, bars et hôtels récupèrent dorénavant toutes leurs matières recyclables. Cette matière est traitée avec la même rigueur que celles collectées par le biais de la collecte sélective. Prétendre le contraire remettrait en question le travail des centres de tri et des conditionneurs de matières, un système sur lequel M. Ménard devrait compter pour traiter les matières si la consigne était élargie à d'autres types de contenants.

De plus, vous écrivez que selon le « Bilan de la gestion des matières résiduelles au Québec de Recyc-Québec, seulement 16 % du plastique utilisé à domicile est mis au recyclage. Karel Ménard dénonce le faible taux de recyclage des bouteilles d’eau en comparaison à celui des boissons gazeuses consignées, qui atteint 75 % ». Pour, M. Ménard, il semble que les consommateurs doivent donc être forcés à recycler en leur imposant une consigne. Pour ma part, je pense qu’il faut plutôt continuer de les sensibiliser à poser le bon geste. Et si le plastique se retrouve peu dans les bacs de la collecte sélective, c’est peut-être parce que les consommateurs sont mêlés et qu’ils ne parviennent pas facilement à savoir quel type de plastique doit s’y retrouver. Il faut poursuivre les efforts et investir dans les bons outils de sensibilisation plutôt que de punir en chargeant une consigne et en forçant les consommateurs à rapporter une multitude de contenants chez les détaillants, ou pire, selon les propositions de M. Ménard, dans des dépôts. Les consommateurs paient déjà assez et ne devraient pas avoir à soutenir deux systèmes parallèles de récupération et de recyclage. Mettre en place des dépôts aurait pour effet d’augmenter le coût de la consigne payée par les consommateurs afin de les soutenir, car les coûts d’implantation et d’opérations seraient nettement plus élevés que la collecte sélective. Il paraît difficile de voir comment ce système de centres de dépôt pourrait survivre sans le support financier des consommateurs et du gouvernement.

Vous mentionnez d’ailleurs que « le Québec et le Manitoba sont les seules provinces canadiennes où la consigne des bouteilles de vin n’est pas obligatoire. Au Québec, 80 % du verre recyclé provient des bouteilles de vin et autres bouteilles d’alcool. La Nouvelle-Écosse a, quant à elle, un système de consigne très élargie. En effet, plusieurs contenants y sont consignés, y compris les briques de jus en carton et les cannes de conserves ». Il est important de rappeler qu’au Québec, seulement 50 % du verre recyclé provient des bouteilles de vin et que l’autre 50 % provient d’autres types de contenants, comme ceux des cornichons par exemple. Les consommateurs recyclent le verre, car il est facile de le distinguer et donc de l’inclure dans les bacs. Globalement, les contenants de boissons non consignés sont récupérés à 67 % sans avoir besoin de recourir à des incitatifs pécuniaires comme la consigne, alors que la consigne plafonne depuis des années entre 68 et 70 %. Quant aux provinces qui ont des consignes, elles n’ont pas davantage de débouchés pour le verre qui finit, comme au Québec actuellement, comme matière de recouvrement dans les lieux d’enfouissement technique ou comme additif dans le ciment. Au Québec, nous avons la chance d’avoir plusieurs acteurs impliqués et actifs incluant des centres de tri qui investissent et d'autres qui travaillent à trouver de nouveaux marchés. 

Enfin, selon M. Ménard, « Les anti-consignes s’opposent à la consigne uniquement parce qu’ils ont peur que les clients achètent moins de bouteilles, si leur coût augmente. L’eau du robinet ne coûte rien. On ne devrait pas avoir à acheter de l’eau, critique-t-il ». Les coûts des boissons gazeuses ou de la bière ont augmenté lorsque la consigne a été introduite en 1983 et les ventes n'ont pas baissées à ce moment et elles sont encore importantes. Encore ici, l’impression générale qui découle d’un tel commentaire c’est que le consommateur ne fait pas les bons choix en achetant de l’eau. Plutôt que d’imposer un mode de vie ou de critiquer les choix des consommateurs, il faut travailler à assurer la récupération et poursuivre les efforts pour bien conditionner les matières, non seulement pour obtenir un bon revenu, mais également pour assurer qu’elles reviendront, sous d’autres formes peut-être, dans la chaîne d’approvisionnement. C’est ce qu’on nomme l’économie circulaire, qui permet la réduction de la consommation de ressources naturelles et cela, en réutilisant en boucles les ressources récupérées. 
La généralisation de la collecte sélective à l’ensemble du Québec et la disponibilité grandissante de bacs dans les espaces publics ainsi que l’adhésion grandissante des consommateurs à la cause environnementale et les changements de leurs habitudes sont autant de facteurs laissant présager une augmentation du taux de récupération au cours des années à venir. Avons-nous encore besoin de la consigne pour forcer les consommateurs à recycler? La réponse est non. Ils sont assez intelligents et ils comprennent l’importance de préserver l’environnement et de réduire la pression sur nos ressources naturelles. 
 

Source: Nathalie St-Pierre, Conseil canadien du commerce de détail

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