Biocarburants avancés: «C’est maintenant que ça se passe»

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Par Fabien Jouanjean

 

Jim Lane, rédacteur en chef de Biofuels Digest.

Les biocarburants avancés dans un contexte énergétique en pleine mutation. C'est autour de ce thème que BioFuelNet, premier réseau de recherche sur les biocarburants avancés au Canada, a organisé son symposium les 22, 23 et 24 juillet dernier à Montréal. Une occasion de réunir au cours d'un même événement tous les acteurs de la filière et de faire le point sur la situation à "un moment critique", comme le souligne Donald L.Smith, directeur scientifique de BioFuelNet Canada.

 

Alors que les premières usines de biocarburant avancé ont démarré leur production sur le continent depuis quelques années, la filière reste fragile, notamment en raison des prix très fluctuants des énergies fossiles. Quelle place occupe concrètement le biocarburant aujourd'hui ? Quel est son avenir ? Quid des polémiques autour de ses impacts environnementaux réels ? Afin de répondre à ces problématiques, nous avons rencontré Jim Lane, rédacteur en chef de Biofuels Digest, revue spécialisée dans les biocarburants, et conférencier d'honneur du symposium.

 

Gaïa Presse: Quels ont été les principales avancées en terme d'innovation ces derniers mois dans le biocarburant ?

Jim Lane: La plus importante des innovation récente est certainement le développement du biocarburant destiné à l'aviation. Les compagnies aériennes commencent à investir dans de nombreux sondages d'opinion après des consommateurs.

Et puis l'intérêt pour la bioéconomie se renforce, on voit des compagnies comme Légo arriver avec de gros investissement, parce qu'elles veulent trouver une alternative matérielle pour fabriquer leurs jouets en plastique.

Il y a également des compagnies comme Coca-Cola, qui veulent révolutionner la fabrication de leurs bouteilles.

 

Parlons du biocarburant aérien. Quelles sont les principales nouveautés dans ce secteur ?

Ces derniers mois, il y a eu des investissements et des promesses d'engagement d'United Airlines dans les technologies visant à transformer les déchets enfouis en carburant. Ca se passe en ce moment même. Et nous venons d'apprendre il y a quelques jours que Fed-Ex et Southwest Airlines sont d'accord pour utiliser un carburant fait à partir de déchets et résidus de bois prélevés en Oregon. On voit donc des compagnies aériennes devenir des consommateurs, devenir des investisseurs, ça se globalise. C'est maintenant que ça se passe et c'est réellement enthousiasmant d'assister à ça.

 

Le biocarburant reste un sujet de controverse sur de nombreux aspects. Par exemple, le fait qu'il utilise des produits de type fertilisants ou pesticides, nocifs pour l'environnement. Où en est-on à ce sujet ?

Prenez le projet dont je vous parlais à l'instant concernant les déchets enfouis. Il n'y a pas de fertilisants dans ce domaine. Il se trouve qu'on a l'obligation de construire beaucoup moins de décharges. Nous produisons bien trop de déchets qui vont à la décharge et nous devons trouver un mode de recyclage, et faire des résidus un produit utile. Ca n'est pas juste les décharges, nous devons transformer le CO2 de quelque chose qu'on envoie dans le ciel en quelque chose d'utile, et on commence à le faire. Voilà la tendance principale aujourd'hui, au delà de l'utilisation de terres ou de l'agriculture.

Vous savez, tout nouveau projet qui est accompagné est aujourd'hui pensé en terme de durabilité. Et il y a une excellente organisation baptisée Table Ronde des Matières Biologiques Durables à laquelle appartiennent les fabricants de biocarburants, et ces derniers ont de sérieux principes. Les producteurs de biocarburants à travers le monde se sont inscrits à ces principes, et il y a un consensus global à propos de la manière de bien faire. Voilà ce dont on a besoin, d'un ensemble de principes.

 

Certains disent que les biocarburants contribuent plus au réchauffement climatique que les énergies fossiles. Est-ce vrai ?

C'est complètement faux. Pour être qualifié comme étant un carburant renouvelable, le biocarburant doit réduire d'au moins 20% ses gaz à effets de serre, par rapport au carburant classique. Et certains vont bien au delà en terme de réduction. Mettons cela en perspective: l'objectif global du Canada, en terme de réduction d'émissions de carbone est de 6% à l'horizon 2024. Alors lorsqu'on parle de 20% de réduction pour une matière première donnée, cela est réellement significatif. Parce que si le Canada avait remplacé seulement 30% de son carburant de transport par du biocarburant, on aurait déjà atteint cette réduction de 6%. Et puis vous devez également vous poser la question: qui nous accuse de cela ? Il n'y a aucune donnée qui corrobore que le biocarburant contribue plus à l'effet de serre. Absolument aucune. Alors, bien entendu, il y a les gens qui ont la mission de vous effrayer, qui utilise la peur, pour empêcher le futur d'arriver. On l'a déjà vu auparavant et on le verra encore dans l'avenir.

 

Quel est la prochaine étape à franchir ? Je pense particulièrement aux matières premières. Où allez-vous les trouver dans le futur ?

Eh bien on va commencer par les matières premières de type résidus. C'est la chose la plus importante. Trouvons toutes les molécules de CO2, récupérons le Monoxyde de Carbone que nous utilisons et qui est à l'état de déchet. Qu'il s'agisse de purger le CO2 ou d'utiliser une nouvelle technologie permettant d'utiliser le monoxyde de carbone comme une matière première, chaque simple résidu peut être transformé en carburant, et doit l'être. Ca c'est la première étape. 

 

Le but est également d'utiliser de nouvelles surfaces pour développer de l'énergie verte, sur des zones impropres à produire une agriculture pour l'alimentation, ce qu'on appelle les terres marginales. Voyons comment les utiliser. C'est une bonne chose parce que, que vous y cultiviez pour faire ou non du biocarburant, faire pousser quelque chose sur ces terres permet de capturer du carbone. Donc voilà là où on en est en terme de matières premières.

On verra également se développer de nouvelles technologies mais aussi de nombreuses nouvelles molécules. Comme je l'ai dit, la "bouteille végétale" est un exemple d'ensemble de molécules dont Coca-Cola à besoin pour fabriquer ses bouteilles en plastique recyclable, et des compagnies comme Heinz et Ford son également impliquées, donc on devrait voir émerger pas mal de choses de ce côté également.

 

Source: GaïaPresse 

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