Produits forestiers et achats responsables

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Les problématiques forestières à l'échelle mondiale

Les différents rôles des forêts ne sont plus à démontrer : écologique, économique mais aussi social. Rôle écologique, car les forêts constituent un véritable puit de carbone en absorbant le carbone du CO2 atmosphérique. Écologique aussi par leur fonction de conservation de biodiversité, en étant un habitat à part entière, avec leur faune et leur flore.

Rôle économique, car les forêts sont notamment exploitées pour le bois, qui constitue une ressource renouvelable importante. Le bois extrait des forêts peut être destiné au secteur de la construction (bois d’œuvre), à l’industrie (papier), ou encore être utilisé comme bois de chauffage. Cependant, le bois n’est pas la seule ressource provenant des forêts, loin de là. Les produits forestiers « non ligneux » constituent aussi une économie importante. Cette matière première d’origine végétale ou animale issue de la forêt est utilisée pour la fabrication de produits alimentaires, cosmétiques, médicaments, etc.

Rôle social, car elles abritent encore aujourd’hui de nombreuses communautés autochtones (au Canada, 80% de ces communautés sont situées en région forestière). Par ailleurs, les forêts sont fréquentées à des fins récréatives, touristiques, ou encore à des fins de détente.

Cependant, malgré ces nombreux avantages, les forêts sont menacées. Les causes ? La surexploitation, l’exploitation illégale ou encore la suppression pure et simple des forêts au profit d’autres activités.

La ressource forestière au Canada et particulièrement au Québec

La forêt québécoise représente 1/5e  du territoire forestier canadien et 2% des forêts sur le plan mondial. Ces forêts couvrent près de la moitié du territoire québécois. Elles se répartissent sur 3 zones de végétation : tempérée nordique (forêt feuillue), boréale (forêt de résineux) et arctique (forêt arbustive et herbacée). Ces 3 zones sont elles-mêmes divisées en 10 domaines bioclimatiques.

Cela témoigne de la richesse et de la diversité du patrimoine forestier québécois. Le drapeau canadien lui-même avec sa feuille d’érable n’est pas sans rappeler l’importance des forêts sur le territoire. Le Canada est le premier exportateur de produits forestiers (le PIB du secteur forestier est d’environ 20 milliards de $, représentant à lui seul 1,25% du PIB).

Les outils en place

Le Régime forestier du Québec est l’un des plus exigeant en la matière. Cependant, afin de garantir les plus hauts standards au niveau international (et définitivement éliminer les pratiques douteuses), il existe plusieurs certifications, délivrées par différents organismes certificateurs. Au Canada, les principaux sont FSC (Forest Stewardship Council) et SFI (Sustainable Forestry Initiative).

On distingue les certifications « d’aménagement forestier » et les certifications de « chaîne de traçabilité ». Le premier type de certification veille au respect des bonnes pratiques sur le site forestier (préservation de la biodiversité, respect des droits des communautés autochtones, etc.). Cette certification s’adresse à tous les exploitants forestiers.

Le second type de certification veille, comme son nom l’indique au respect de la chaîne de contrôle. Cette certification s’adresse à tous les intermédiaires du lieu de coupe forestière jusqu’à la vente du produit forestier au client final, à savoir : les industriels et les détaillants. Cette certification chaîne de traçabilité mets l’accent sur la traçabilité physique et documentaire des produits forestiers. Elle complète la première certification pour garantir à l’acheteur final que le bois acheté provient bien d’une forêt certifiée, et qu’il n’y a pas eu de confusion (volontaire ou involontaire) au cours de la chaîne d’approvisionnement.    

Pour que le bois soit vendu en tant que produit certifié « Chaîne de Traçabilité », tous les organismes doivent impérativement être certifiés. Prenons l’exemple simple d’un circuit comportant 3 entreprises : Exploitant forestier X, Industriel Y, Détaillant Z. Pour que le Détaillant Z puisse vendre du bois « Chaîne de Traçabilité », l’Exploitant forestier X doit impérativement être certifié « Aménagement forestier » et l’Industriel Y doit impérativement être certifié « Chaîne de Traçabilité ».

Ces certifications garantissent le respect de différents principes de développement durable en matière d’exploitation forestière. Cette garantie est basée sur le contrôle de critères par une tierce partie, à l’aide d’audits terrains et documentaires. Ces certifications constituent de véritables outils de différenciation, que ce soit en « Business to Business », mais aussi en « Business to Consumer ».

Le véritable défi est de représenter un cahier des charges robuste par un logo ou une appellation facilement identifiable. Par ailleurs, ce type de certification forestière peut aussi être relié à d’autres certifications : l’exemple de la certification FSC reconnue dans le cadre de la certification LEED (dans le domaine de la construction) en est la parfaite illustration.

Les enjeux actuels

Il faut bien reconnaître que plusieurs enjeux pèsent sur ces certifications. Tout d’abord, la définition des critères de ces référentiels est hautement stratégique et impactante pour l’ensemble du secteur. La constitution des comités en charge de la rédaction de ces référentiels l’est donc tout autant. Différents organismes sont représentés dans ces comités : industriels, organismes publics, ONG, etc.

Ensuite vient le moment d’appliquer ce référentiel sur le terrain: force est de constater que le défi est immense pour concilier une norme qui soit à la fois hautement exigeante mais qui reste digeste dans sa mise en œuvre. Cette certification peut aussi amener à des dilemmes, mettant en opposition les intérêts économiques et les intérêts environnementaux par exemple.

La concurrence entre ces certifications est aussi bien réelle. Cette compétition est très saine car elle permet aux différents acteurs de se questionner et d’être véritablement novateurs. Cependant, il est indéniable qu’il existe une complexité voire une confusion dans l’esprit du consommateur au sujet de ces labels. Ces certifications ont pour rôle d’apporter une garantie, une crédibilité pour faire face au greenwashing réalisé par certaines marques. Malheureusement, la route est encore longue pour que les consommateurs reconnaissent les certifications sérieuses. Un important travail de sensibilisation est toujours nécessaire à ce sujet.

En conclusion, même si les certifications telles que FSC ou SFI nécessitent d’être constamment améliorées, elles sont définitivement nécessaires dans le paysage de l’achat responsable, à l’échelle du consommateur mais aussi de l’entreprise. Ces écolabels cristallisent les efforts d’une entreprise, dans ses processus de production ou d’approvisionnement. Ils cristallisent aussi le désir du consommateur d’acheter écoresponsable.

Pour que la certification joue pleinement son rôle, le secteur nécessite des données encore difficiles à obtenir à ce jour concernant les motivations d’achat. Il est en effet assez compliqué de savoir si la certification du produit est à l’origine de l’acte d’achat, et si oui, à quelle hauteur. Acheter des produits certifiés par une tierce partie doit devenir la norme, tout en sachant que cette norme doit évoluer pour prendre en compte tous les enjeux.

Nicolas Peron
Spécialiste en développement durable

Nicolas Peron est diplômé de l’ESC La Rochelle en France (Master Stratégie de Développement Durable).
Il s’intéresse plus spécifiquement aux domaines de l’audit et de la certification, dans différents secteurs (bâtiment, industrie, grande distribution).

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