Barrrage hydro-électrique controversé : Lula visite le site de Belo Monte pour promouvoir le développement économique de l'Amazonie

0

Par Antoine Bourgoignie
En exclusivité pour GaïaPresse


 

Mots-clés : Lula, barrage hydroélectrique, Altamira, Para, Brésil

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva visitera en début de semaine le site du futur barrage hydroélectrique de Belo Monte à Altamira en Amazonie. Par la même occasion, il tentera de rassurer la communauté locale et de convaincre les nombreux opposants de la nécessité de ce projet controversé, jugé nécessaire pour soutenir la croissance économique du pays, son augmentation constante de la demande en électricité et le développement de la région, l’une des plus pauvres du Brésil.
Il s’agira de la première visite officielle du président sur ce territoire depuis que le tribunal fédéral de Brasilia a autorisé en avril dernier, au terme d’une bataille judiciaire de près de 30 ans, la construction en pleine forêt amazonienne du troisième plus grand barrage hydroélectrique au monde, après ceux des Trois Gorges en Chine et d’Itaipu à la frontière entre le Paraguay et le Brésil.
 
Lula mise sur son importante popularité pour calmer les protestataires. Il compte également profiter de ce déplacement pour lancer la campagne électorale et mettre en avant la candidate du Parti des travailleurs (ndlr: PT – Partido dos trabalhadores, le parti au pouvoir), Dilma Roussef, ancienne ministre de l’Énergie et pressentie pour succéder à Lula à la tête du pays. Les élections auront lieu le 3 octobre 2010.
 

Un barrage inefficace

La construction du barrage hydro-électrique, d’un budget initial de 11 milliards de Reals (R$) (6 milliards de dollars canadiens) risquerait au final d’avoisiner les 30 milliards de R$ (près de 16 milliards $CA), selon une nouvelle analyse préliminaire réalisée par le consortium à dominante publique Norte Energia qui a remporté l’appel d’offres. Une somme financée à plus de 90% par des fonds publics, via notamment la banque de développement du Brésil.
 
Au plan technique, la capacité théorique annuelle du barrage est de 11 millions de mégawatts (MW), soit l’équivalent de 12,5% de la capacité de production électrique actuelle du Brésil[1]. Par contre, la production annuelle moyenne ne devrait pas dépasser les quatre millions de MW à cause des importantes variations saisonnières du niveau d’eau de la rivière Xingu selon une étude du Conservation Strategy Fund publiée en 2006[2]. Le barrage Belo Monte deviendrait ainsi l’un des complexes les moins efficaces au monde.
 
La rentabilité totale du projet a d’ailleurs été remise en question par les investisseurs potentiels avant l’adjudication du contrat lorsque le gouvernement a fixé comme condition un prix maximal de revente de l’électricité de 83R$/MWh. Sa volonté est de garantir un approvisionnement intérieur en électricité à un coût accessible pour l’ensemble des Brésiliens. Ce prix fixe, inférieur aux coûts estimés d’exploitation, a causé en conséquence, le retrait de la firme française GDF-Suez et de la firme brésilienne Odebrecht, leader sud-américain du secteur de la construction et initialement intéressés aux travaux.
 
 

Une énergie vraiment verte?

Au total, ce sont selon le gouvernement, quelque 500 kilomètres carrés de forêt et de terres cultivables qui seront inondées par la création du bassin de rétention des eaux, en face de la ville d’Altamira. Le débit de la rivière en aval du barrage sera aussi réduit de 80%, mettant en péril la survie de l’écosystème régional, dénonce Francisco Hernandez, ingénieur électrique et leader du groupe d’expert académiques indépendants[3] qui a soumis une large étude technique du barrage à l’agence brésilienne de protection de l’environnement (IBAMA) en octobre 2009.
 
La construction de l’usine hydroélectrique dans la ville de Belo Monte, distante d’une cinquantaine de kilomètres d’Altamira, nécessitera le creusement d’un canal de dérivation des eaux et d’un canal secondaire qui nécessiteront le déplacement de plus de terre que le canal de Panama, aggravant d’autant les dommages environnementaux causés par le projet[4]. À ce sujet, une étude environnementale menée par l’Institut national de recherche de l’Amazonie, un institut gouvernemental[5], a démontré que la déforestation et la décomposition des matières organiques inondées par le barrage de Belo Monte causerait plus du double de la pollution atmosphérique qu’une centrale électrique au charbon, de même capacité, pendant les vingt premières années d’exploitation et plus du quadruple pendant les dix premières années.
 

Une Bombe atomique sociale

Selon Sergio Leitao, directeur de campagne de Greenpeace Brésil, ce projet est une véritable bombe atomique sociale. Il estime que plus de 40,000 personnes seront dérangées par le barrage, dont 20,000 seront déplacées par les sociétés du consortium Norte Energia avec l’aval des autorités brésiliennes. La coupure des routes maritimes traditionnelles pour le commerce, l’inondation des terres cultivées, et l’impact sur l’industrie de la pêche sont autant de facteurs qui vont bouleverser l’économie de toute la région.
 
Le chantier lui-même, qui devrait débuter en septembre 2010, attirera dans la région quelque 100,000 travailleurs, doublant la population actuelle en quelques mois selon Raimundo Moraes, procureur de l’État du Para où se trouve Altamira. Cet afflux massif de migrants risque d’engendrer une augmentation des problèmes de violence urbaine, de prostitution, ainsi qu’une déforestation massive des alentours de la ville pour subvenir aux nouveaux besoins des habitants.
 
Dans ces conditions, la visite du président Lula cette semaine à Altamira s’annonce d’ores et déjà électrique. Selon Renata Pinheiro du Mouvement des habitants de la rivière Xingu (Movimento Xingu Vivo para Sempre[6]), une ONG pour la défense des intérêts des habitants de la région, des manifestations et plusieurs activités de protestation viendront perturber l’agenda du président et faire entendre la voix des populations locales et indigènes qui s’opposent au projet.
 

GaiaPresse couvrira ces événements en direct de la région d’Altamira. Un dossier d’analyse complet sur le projet Belo Monte est également en préparation et sera très bientôt disponible sur notre site!


copyright: international river network 

 


Source : http://eixodajustica.blogspot.com/2010/05/motivos-e-desmotivos-de-belo-monte.html (libre)


 
[1]           Chiffres OCDE 2009

[3]           http://www.internationalrivers.org/en/node/4727

[4]           Http://www.amazonwatch.org

[6]           http://xingu-vivo.blogspot.com/

 
Partager.

Répondre