Vers une nouvelle économie

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Par Simon Lanoie,
Vice-président de GaïaPresse


Mots-clés : Nouvelle économie, finance environnementale, Carbon War Room, Conférence de Cancun, CoP16, CdP16, marché du carbone, économie internationale, changements climatiques.

 

Une semaine après l’ouverture de la Conférence de Cancun sur les changements climatiques, il est à prévoir une impasse politique entre les pays ayant adhéré au protocole de Kyoto et les pays n’en faisant pas partie, quant à sa suite ou sa reconduction. Les divergences sont grandes et chacun renvoie la balle au voisin, prétextant que si ce dernier ne prend aucune mesure contraignante, ils ne sont pas disposés à passer à l’action non plus.

La bonne entente entre les pays est un objectif de plus en plus difficile à atteindre en ce début du 21e siècle, où la mondialisation des échanges commerciaux et des flux financiers internationaux atteignent des niveaux historiquement jamais égalés. Les regroupement de pays tels que l’Union européenne et le G20 sont confrontés à des défis globaux comme la lutte aux changements climatiques ou à la pauvreté, et sont à la fois contraints par leurs impératifs nationaux de développement économique.

 

Le « Carbon War Room » : réinventer le système économique

Une nouvelle approche est nécessaire. Le célèbre et richissime innovateur Richard Branson, PDG de l’entreprise Virgin, a participé à la mise sur pied du Carbon War Room, une organisation visant à canaliser la force et les énergies des entrepreneurs afin d’implanter des solutions de marché au défi des changements climatiques. Cette initiative aspire à accentuer l’évolution de l’économie du 20e siècle, basé sur l’utilisation massive d’énergie fossile vers une nouvelle économie faible en carbone, durant le 21e siècle.

Les entrepreneurs sont invités à rejeter les méthodes dépassées de l’ancienne économie. Ils utiliseront une nouvelle façon de penser, de concevoir les choses, un leadership innovateur, afin de créer une économie post-carbone. L’objectif n’est pas de défaire l’actuel système, mais de contribuer à le faire évoluer en une force qui soutiendra la création de richesse durable pour les futures générations. Il est temps de réinventer notre système économique, et le Carbon War Room veut créer un réseau d’individus talentueux qui contribuera au façonnement de la nouvelle économie plus respectueuse de l’environnement et de la biodiversité.

 

Sept théâtres d’intervention

Le Carbon War Room dispose de sept théâtres d’opération. La première bataille se situe au niveau du secteur de la production d’électricité. La production d’énergie renouvelable, le développement des capacités de stockage et la mise sur pied de réseaux de distribution intelligents (smart grid) sont les principaux objectifs de ce premier théâtre d’opération.

Le second théâtre s’attaque aux systèmes de transport. Il inclut l’augmentation des transports en commun, l’utilisation de biocarburant comme combustible alternatif et vise les camions, les trains, le transport aérien et maritime. Mr Branson est lui-même actif dans la recherche et le développement de ce type de combustible pour la flotte de sa compagnie aérienne, Virgin Atlantic.

La Chine adhère à cette vision : elle planifie la mise en œuvre en 2012 du nouveau Train Grande Vitesse Shanghai-Pékin, qui reliera les deux villes en 5 heures plutôt que 10 heures auparavant. Il y a quelques jours, une expérience pilote menée par les Chinois leur a permis de briser le record de vitesse avec une pointe à 486 km/h avec ce TGV, entièrement conçu en Chine.

D’autres théâtres d’opération du Carbon War Room sont la recherche d’efficacité énergétique dans les bâtiments, et la réduction des émissions de gaz à effet de serre produites par les industries.

La protection des forêts existantes, la lutte à la déforestation, l’utilisation écologique des terres pour l’agriculture et les efforts de reboisement permettront de préserver le maintien d’importants puits de carbone et la protection de la biodiversité qu’elles hébergent.

La sixième initiative vise l’assistance aux pays en voie de développement pour l’inclusion de technologies faible en carbone dans leur modèle de croissance économique. En effet, la Chine est dorénavant le plus grand émetteur mondial de CO2, et le Brésil et l’Inde disposent d’importantes populations qui aspirent à atteindre le niveau de vie des classes moyennes des pays industrialisés. Un véritable défi se pose à eux, et la collaboration et le soutien des pays industrialisés sont cruciaux.

Finalement, la gestion du carbone est la clé de la lutte aux changements climatiques. Puisque ce problème est global, la solution ne peut que l’être aussi. En plus des efforts de réduction d’émissions des GES, les opportunités de gestion des émissions existantes doivent être explorées. Les techniques de gestion du carbone incluent les mécanismes d’échanges de crédits d’émissions de GES, la captation et le stockage, la reforestation, le remplacement de carburants fossiles par des biocarburants et l’augmentation de production d’énergie renouvelable.

 

La mutation du système financier

Les systèmes financiers actuels sont en mutation suite à la crise financière de la fin de la décennie. L’apparition de nouvelles commodités environnementales permettra l’inclusion de différents facteurs tels que le coût en carbone et de la valeur de la perte de biodiversité. Ces instruments de la finance environnementale permettront d’inclure les coûts d’externalités, toujours ignorés dans le prix de vente des produits et services. Les produits et services à forte teneur en carbone (voyages en avion, transports) se verraient devoir inclure ce coût dans leur prix de vente.

Les sommes provenant du marché du carbone serviraient au développement de projets de réduction d’émission de GES, telle que la reforestation de zone coupée à blanc, en milieu rural de pays défavorisé. De tels projets permettent entre autres la création d’emplois non-qualifiés et la valorisation de la biodiversité.

 

L’appel de Branson : accepter de changer de modèle économique

L’appel de Richard Branson aux entrepreneurs du monde entier survient à un moment pivot où une transition s’effectue dans l’espace économique mondial. L’Internet amène de nouveaux modes de collaboration, l’information circule à la vitesse de la lumière et l’accès aux connaissances universelles est accessible à tous. Le livre Macrowikinomics fait référence à notre entrée dans l’âge de l’intelligence de réseau (the age of networked intelligence). « Avec le recul, nous prendrons conscience que cette période fût le début d’une transition historique de la période du capitalisme industriel vers une nouvelle forme d’économie basée sur de nouveaux principes et de nouvelles façons de penser et de se comporter… Les organisations qui réussiront et auront du succès dans ce nouvel environnement économique seront celles qui auront embrassé les cinq principes de wikinomics, soit la collaboration, l’ouverture, le partage, l’intégrité et l’interdépendance. » (traduction libre de Macrowikinomics, rebooting business and the world, 2010, D. Tapscott et A.D. Williams)

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