Une région au cœur de la forêt et une forêt au cœur des communautés!

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Par Jacinthe Caron et Amélie Normand,
Du Conseil régional de l’environnement de l’Estrie et de l'Association forestière des Cantons de l'Est


L’Estrie est une région diversifiée en termes d’usages du territoire. Le diagramme présenté ici démontre toutefois la grande importance qu’occupe la forêt. Parmi les terres forestières publiques, on retrouve en Estrie trois parcs nationaux, deux zones d’exploitation contrôlée (ZEC) et une forêt habitée.

 

La forêt privée compte quant à elle pour 91 % de la superficie forestière estrienne. Afin de mieux comprendre le contexte forestier de la région, les prochaines lignes présentent en quelques chiffres* des informations régionales associées aux trois grands axes du développement durable. La section suivante de l’article présente quelques initiatives régionales allant dans le sens d’un développement durable des forêts de l’Estrie.


La forêt, un axe dynamisant de l'économie estrienne

L’Estrie, dénombre quelque 9 200 propriétaires de boisés. De 1993 à 2008, les investissements consentis à la mise en valeur de la forêt privée de l’Estrie ont représenté 60 M$, soit près de 3,8 M$ en moyenne annuellement. Entre 2003 et 2008, la valeur totale brute du volume de bois mis en marché par les syndicats de producteurs de bois s’élève à 186,6 M$.

En Estrie, 192 entreprises sont du domaine de l’industrie du bois, ce qui représente 25 % des entreprises manufacturières de la région. Or, les activités forestières ne sont pas qu’associées à la production forestière. En 2007, l’Estrie était la 2e région acéricole du Québec, après la région de Chaudière-Appalaches. La région produisait 17 % de tout le sirop d’érable au Québec. Les industries de transformation du bois fournissent quant à elles 18 % des emplois manufacturiers de l’Estrie. Selon une étude du ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF) (Bouchard, 2007), réalisée à partir de données de 2001 et de 2003, le et portant sur le tourisme lié à la faune dans la région engendre des dépenses représentant 9 004 869 $ pour les adeptes locaux, et de 4 788 834 $ pour les visiteurs québécois. Les activités de chasse et de pêche injectent plus de 13 millions de dollars annuellement en Estrie, alors que les revenus générés par la production d’arbres de Noël étaient estimés à 12,5 M$ en 2008.

 

La forêt, un environnement à part entière

La superficie forestière productive en Estrie est occupée majoritairement par la forêt feuillue (38 %) et par la forêt mélangée (37 %). Les forêts résineuses sont quant à elle présentes sur 17 % du territoire, alors les 8% restants sont couverts par des forêts en voie de régénération. En excluant les aires protégées, 84 % du territoire forestier productif, de tous couverts confondus, est composé de peuplements âgés de 60 ans et moins (incluant les peuplements jeunes inéquiennes).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On voit ici, dans le boisé Johnville, un changement brusque de peuplement d'arbres en passant de feuillus tolérants bordé à une prucheraie.
Tous droits réservé. Amélie Normand

 

 

Le noyer cendré, une espèce rare en Estrie.
Tous droits réservés. Daniel Tigner

En forêt privée, 32 % de la superficie est certifiée selon la norme Forest Stewardship Council. En Estrie, 57 plantes ont été identifiées comme étant menacées, vulnérables ou susceptibles de le devenir, dont plus de la moitié est associée au milieu forestier. 

 

 

Cette liste n’inclut qu’un seul arbre, soit le noyer cendré (Juglans cinerea). Le MRNF a identifié 71 écosystèmes forestiers exceptionnels, dont quatre en forêt publique et 67 en forêt privée, couvrant plus de 2 300 hectars. Les milieux humides d’une superficie d’un hectare et plus couvrent environ 23 341 hectars (environ 2,1 % du territoire de l’Estrie). Malgré tout, moins de 3 % du territoire de l’Estrie est protégé.
 

Du côté de la faune, la densité estrienne de cerfs a varié considérablement au cours des dernières décennies passant de moins d’un cerf au km2 au milieu des années 1970 à plus de 10 cerfs au km2 à la fin des années 1990 dans la zone 6, et à plus de 6 cerfs au km2 dans la zone 4 pour la même époque. L’orignal, l’ours noir et deux espèces de lynx (roux et du Canada) profitent également des grandes forêts de la région. Les deux espèces de lynx sont toutefois susceptibles d’être désignées vulnérables ou menacées. Parmi les oiseaux forestiers présents sur le territoire, la grive de Bicknell mérite un statut très précaire. La population de dindons sauvages proviendrait des États-Unis et est en progression en Estrie, notamment en raison du réchauffement climatique.

 

La forêt, un terrain de jeu

L’Estrie compte environ 6 % des adeptes (locaux et visiteurs) du Québec de la chasse sportive, 4 % des adeptes du Québec de la pêche sportive et 7 % des adeptes d’activités extérieures liées à la nature sans prélèvement. On compte dans nos forêts 725 kilomètres de sentiers de randonnée pédestre et plus de 90 % de l’offre récréative de la région touristique des Cantons-de-l’Est. Les Cantons-de-l’Est couvrent la région administrative de l’Estrie et une partie de celle de la Montérégie-Est. L’Estrie possède environ 400 infrastructures, privées et publiques, reliées au loisir de plein air.

La proximité avec les grands centres (Sherbrooke, Montréal, Québec, Vermont) exerce certainement pression sur les milieux naturels. Ainsi, outre la production forestière et l’acériculture, la forêt estrienne est prisée pour les activités récréotouristiques (randonnée, ski de fond, ski alpin, etc.), mais aussi pour la conservation de la biodiversité, tout en étant menacée par le développement immobilier, surtout sur terres privées.


Boisé Johnville – Tous droits réservé. Amélie Normand
 

Même si le portrait forestier élaboré par la Commission régionale sur les ressources naturelles et le territoire de l’Estrie présente très bien les rôles des intervenants, voici quelques initiatives propres à l’Estrie qui font la promotion de la gestion durable des ressources naturelles.

L’Estrie est dotée d’une seule unité d’aménagement forestier, donc, d’une seule Table de gestion intégrée des ressources naturelles et du territoire public (GIRT). La table regroupe des intervenants issus des différents domaines d’intérêt en lien avec le milieu forestier, incluant les représentants : des détenteurs de garanties d’approvisionnement de l’unité d’aménagement, des groupes de gestion de la faune, des acériculteurs, des municipalités, d’organismes récréotouristiques et de l’environnement. Les intérêts de chacun sont donc confrontés autour de la table qui établit les priorités d’aménagement forestier pour le maigre pourcentage de forêt publique productive et accessible dans la région.

 

Étant donné le caractère privé de la forêt estrienne, Les Sentiers de l’Estrie s’est donné pour mission de signer des ententes avec des propriétaires de domaines forestiers pour assurer des droits de passage pour fins de randonnée pédestre. Un vaste sentier de randonnée de plus de 200 km permet donc aux membres de l’organisme de traverser une vaste section du territoire forestier de l’Estrie et d’apprécier la diversité des milieux naturels.

En réponse à une demande croissante pour du bois certifié, le Syndicat des producteurs de bois de l’Estrie (SPBE) a reçu, en 2010, une « certification de groupe » applicable aux petites superficies boisées. Cette initiative permet à tous les propriétaires de certifier leurs propriétés selon la norme FSC ou CSA. Alors que le SPBE se rend responsable des pratiques des producteurs de bois, ces derniers ont accès plus facilement à une norme qu’ils ne seraient peut-être pas en mesure d’obtenir autrement.

 

Le Corridor appalachien, en étroite collaboration avec des organismes de conservation locaux et nationaux, a participé à la protection de plus de 4 000 hectares de forêt privée (en Estrie et dans l’est de la Montérégie) grâce à une stratégie de conservation à l’échelle du paysage.

Tous droits réservés. Daniel Tigner

La Fiducie de recherche sur la forêt des Cantons-de-l’Est prône l’innovation, la sensibilisation et l’amélioration des connaissances de notre forêt tout en impliquant les propriétaires forestiers dans leurs travaux d’expérimentation. Les travaux de la Fiducie se concentrent sur la croissance, l’évolution des peuplements, le reboisement et le suivi des espèces à statut précaire.

 

L’Agence de mise en valeur de la forêt privée de l’Estrie a entrepris en 2006 de rencontrer une vingtaine de propriétaires privés chez qui des écosystèmes forestiers exceptionnels ont été identifiés. Ceux-ci ont donc été avisés des pratiques à adopter en vue de protéger ces milieux fragiles.

 

L’Association forestière des Cantons de l’Est est un organisme voué à la sensibilisation, l’éducation et le transfert des connaissances sur l’arbre, la forêt et le bois. Ses activités couvrent le territoire de l’Estrie, de la Montérégie, du Centre-du-Québec et de la Beauce. Elle prépare actuellement une trousse pédagogique sur la forêt de l’Estrie, tant sur les plans économique, social et environnemental. Cette trousse est destinée aux enseignants et aux élèves des écoles secondaires de la région.

 

L’Estrie est le chef de fil dans la transformation du bois d’apparence et composites (créneau ACCORD). L’industrie forestière est une activité économique d’importance de la région. Elle se concentre surtout dans la fabrication des pâtes et papiers, dans la deuxième et la troisième transformation, et dans les produits dérivés.

 

H. Zell – Wikipedia

Les événements à suivre

Les activités associées à la forêt sont très variées, ce qui suscite l’émergence d’une grande quantité d’intervenants. L’Estrie est particulièrement riche en organismes qui se préoccupent du développement d’activités forestières durables. Voici les évènements qui soulignent l’importance de l’arbre, de la forêt et du bois dans nos vies :


Pour en savoir plus


* Sources : Plans sectoriels des ressources naturelles et du territoire de l’Estrie

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