Le nouveau Règlement sur la protection des eaux est-il une porte ouverte aux compagnies pétrolières et gazières?

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Par Marina Tymofieva


Le collectif de scientifiques qui dénonçait les aberrances du nouveau Règlement sur le prélèvement et la protection des eaux vient de réitérer ses inquiétudes à des citoyens montréalais lors d’une conférence grand public. En effet, suite au point de presse organisé par le collectif, où seul GaïaPresse avait pris la peine de se déplacer, les experts ont jugé nécessaire d’interpeler le public pour dénoncer les incohérences et les dangers du nouveau Règlement provincial.
 

Des distances séparatrices « ridicules »

Déjà en février 2011, le BAPE avait noté qu’il faut « combler les lacunes dans la compréhension de l’écoulement des eaux souterraines à des profondeurs de plus de 100 mètres ».  Visiblement, ces lacunes n’ont pas été comblées. Actuellement le Québec compte 31 puits de fracturation hydraulique. 64% de ces puits fuient.

Pour protéger les aquifères d’une éventuelle contamination par les puits de gaz ou de pétrole, le nouveau Règlement interdit de forer à moins de 400 mètres de profondeur à partir de la base de l’aquifère. Or, « une portion de fracture horizontale réalisée a inévitablement une extension verticale. Il est impossible de prévoir la distance à laquelle va s’étendre cette fracture. Des études aux États-Unis ont montré que certaines fractures s’étendent verticalement jusqu’à 588 mètre. Et ça, ça veut dire qu’elles se rendraient directement dans l’aquifère. » a déclaré Céline Marier, biologiste ayant participé à l’analyse du Règlement.

Quant aux exploitations agricoles, elles n’ont même pas été mentionnées. Si la tête (et non les parties souterraines) d’un puits d’exploitation gazière/pétrolière n’a pas le droit de se trouver à moins de 500 mètres d’un puits d’eau destinée à la consommation humaine, il n’en est pas de même pour des puits d’eaux destinés à l’arrosage des culture ou l’abreuvage des animaux. « Cette distance de « protection » ne vaut rien, puisqu’en nous basant sur des études réalisées en Pennsylvanie, nous avons constaté que dans une distance inférieure à 1 kilomètre, les puits sondés avaient 17 fois plus de méthane d’origine thermogénique, mais aussi de l’éthane, propane et butane. » a ajouté Mme Marier.

 

Un règlement fait sur mesure, pour qui?

L’inclusion des articles 40 à 46 dans un règlement qui porte sur l’eau, sert à fournir dès août 2014 un encadrement légal de la fracturation hydraulique, avant même la fin d’un BAPE qui étudie cette question pour le gaz de schiste et avant même les conclusions d’un autre BAPE annoncé pour le pétrole d’Anticosti. Durant la conférence, l’ingénieur-géologue Marc Durand a dénombré plusieurs aberrations du Règlement, dont le fait que les sondages stratigraphiques réalisés au préalable par les entreprises, ne sont pas soumis aux obligations attachées aux forages des puits d’exploitation, et ce même s’il s’agit des mêmes techniques. Ils ne nécessitent pas, par exemple, d’études géologique ou de sondage de la population environnante et ne sont pas soumis à la distance séparatrice horizontale des 500 mètres.

Les entreprises ne sont pas dans l’obligation de produire un rapport sur l’exploitation, en ce qui concerne les impacts des puits sur l’environnement. En revanche, si tel rapport est produit et qu’il est transmit au ministère, selon la loi il ne sera pas rendu public durant 3 années après la fin de l’exploitation de l’entreprise. Plus étonnant encore, les entreprises ne sont tenues responsables des impacts des forages que pendant une période de 10 ans après la fin des travaux, alors que personne ne peut prédire à quel moment une contamination va se manifester à la surface du sol.

« Nous voyons la promulgation de ce projet come étant en faveur des compagnies gazières et pétrolières.  On essaye de nous faire passer morceau par morceau un plan global, une stratégie préétablie de la pétro-économie au Québec » a conclu Richard Langelier, docteur en droit et doctorant en sociologie.

 

Source: GaïaPresse

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