Gouvernements et sociétés civiles « condamnés » à travailler ensemble

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Par Jessica Nadeau


Mots-clés : Le futur que nous voulons, Rio+20, Équiterre, AQLPA, Chantal-Line Carpentier

 

Rio+20 - the future we want: Launching a Global Conversation
Photo: Flickr

Depuis quelques jours, les critiques pleuvent sur le texte final « Le futur que nous voulons », adopté par les États membres des Nations Unies à Rio+20. De façon générale, la société civile se dit déçue par le manque d’engagement et d’avancées sérieuses. Mais, au-delà des critiques, tout n’est pas négatif. Les groupes écologistes comptent utiliser le peu de gains obtenus pour mettre encore plus de pression sur les gouvernements.

« Lorsque nous sommes sortis de Rio, en 1992, nous tenions sensiblement le même discours, se souvient Steven Guilbault d’Équiterre. Aussi, lorsque nous sommes sortis de Kyoto en 1997, nous étions déçus, car nous voulions des cibles de réduction de gaz à effet de serre de 20 %. Mais chaque fois, nous trouvons le moyen de transformer cela en symbole afin de mettre de la pression sur les gouvernements. C’est ce que nous ferons encore une fois. Nous avons des engagements qui sont minces, mais nous allons travailler avec cela pour aller plus loin », promet-il.

Selon le célèbre activiste d’Équiterre, les gouvernements et la société civile n’ont d’autres choix que d’unir leurs forces pour créer un monde meilleur. « Nous sommes condamnés à travailler ensemble et condamnés à réussir… »

 

Un outil essentiel

À l’AQLPA, Patrick Bonin, directeur de la campagne climat et énergie, se dit bien évidemment déçu de cette « entente qui se base sur le volontarisme » et qui remet à plus tard les initiatives nécessaires pour résoudre les crises économique, sociale et environnementale. Il parle degreenwashing de la part des États.

Mais, en parallèle, il affirme que cette mascarade est néanmoins nécessaire pour faire avancer les choses.

« Ça prend des engagements de la société civile, mais également des chefs d’État. Il est nécessaire d’avoir des ententes concertées au niveau international. Ce n’est pas le seul outil et on ne peut pas se fier aux leaders pour régler le sort de la planète, mais on doit tenter de les utiliser »

 

Le paradoxe des grands groupes

Au Secrétariat des Nations Unies, la Québécoise Chantal-Line Carpentier a eu la lourde tâche de coordonner ceux qu’on appelle les « major groups » ou grands groupes, soit les neuf groupes influents issus de la société civile reconnus par l’ONU : femmes, autochtones, syndicats, autorités locales, jeunes, entreprises, ONG, la communauté scientifique et les paysans. Un total de plus de 10 000 personnes à gérer!

Chaque matin, elle rencontrait quelque 400 membres de ces groupes pour faire le point sur les négociations de la veille. Et ce qu’elle constatait, c’est qu’il est bien difficile de s’écouter, de part et d’autre.

« Il y a 193 gouvernements qui doivent s’entendre et certains sont en guerre, littéralement, [les uns contre les autres]. Les neuf grands groupes dénonçaient le fait que les gouvernements n’arrivaient pas à s’entendre, alors qu’eux-mêmes échouaient à se mettre d’accord autour de la même table. Il y a là un paradoxe. »

 

Un « petit miracle » brésilien

Elle trouve désolant qu’il n’y ait que les aspects négatifs du document qui soit sorti dans les médias. « Les médias ne parlent jamais du positif. Tout ce qui sort, c’est un rejet massif du document, qu’il n’y a aucune avancée, alors que c’est complètement faux. »

Elle poursuit : « C’est sûr que pour les Greenpeace et World Wild Fund (WWF), c’est leur travail de se plaindre. Leur membership veut ça. C’est sûr qu’ils vont toujours demander plus, et c’est correct, c’est leur travail, mais ce n’est pas la majorité des ONG. »

Et bien qu’elle reconnaisse, comme tous, que le texte aurait pu être plus ambitieux, elle estime que, dans le contexte actuel, c’est sans doute le meilleur accord  que l’on pouvait obtenir. Les Brésiliens ont fait, selon elle, « un petit miracle » en réussissant à obtenir un document faisant consensus.

« Si on n’avait pas réussi à sortir avec un consensus, ça aurait été la troisième conférence des Nations Unies qui ne menait à rien [après la 15econférence sur le climat à Copenhague et la récente Commission du développement durable, de New York]. Ç’aurait été une pente difficile pour le système multilatéral de survivre sans quelque chose de positif ici », reconnaît-elle.

 

Pour une journée de grève mondiale

Du côté du Sommet des Peuples, on a également réussi à accoucher d’un document final vendredi soir. Le texte défend le bien commun et condamne la marchandisation de la vie. Il interpelle la population mondiale et l’invite à unir ses forces.

Le Sommet des peuples réunit une quinzaine de grandes déclarations communes, notamment contre la criminalisation des organisations sociales, la violence faite aux femmes, pour la démocratisation des moyens de communication, pour la solidarité avec les peuples victimes de coups d’État et pour la souveraineté alimentaire.

Le dernier point appelle à l’organisation d’une journée de grève mondiale.

Une vingtaine de délégués du Sommet ont été invités à rencontrer le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, vendredi soir. Ce dernier leur a tendu la main, rapporte Chantal-Line Carpentier.

« Le secrétaire général leur a expliqué qu’ils étaient les bienvenus à participer à l’ONU, même s’ils voulaient continuer de faire leur évènement à l’extérieur. S’ils avaient l’intention de ramener le résultat de leur consultation à l’ONU, on serait content de les recevoir. »

 

Source: GaïaPresse

 

GaïaPresse a pu envoyer la journaliste Jessica Nadeau à la Conférence des Nations Unies sur le développement durable à Rio au Brésil grâce à un soutien financier du Gouvernement du Québec.

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