Nature Québec demande au gouvernement du Québec de s’opposer formellement à la dérivation de Waukesha

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Suite à la demande de dérivation d’eau présentée par la ville de Waukesha, Nature Québec estime, en vertu de l’Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent, que cette requête est irrecevable. En effet, l’Entente interdit tout transfert d’eau hors bassin. Or, la ville de Waukesha (État du Wisconsin), demande une exception à l’interdiction de transfert d’eau hors bassin pour autoriser un transfert d’eau du lac Michigan. Selon l’analyse de Nature Québec, si cette demande est acceptée, il s’agirait de la première exception faite à la règle de l’Entente. Et cela pourrait constituer un dangereux précédent. Nature Québec invite enfin le gouvernement du Québec, en tant que signataire de l’entente, à s’opposer fermement à la proposition de Waukesha. Il s’est exprimé dans un mémoire envoyé aujourd’hui aux deux Conseils des Grands Lacs et du Saint-Laurent concernés par l’affaire.

Une mesure extrême et de dernier recours

Pour Marc Hudon, président de la commission Eau de Nature Québec, « cette demande représente un « test » majeur de la détermination des États américains, de l’Ontario et du Québec à faire respecter non seulement les critères de l’Entente, mais aussi l’esprit ou la volonté des juridictions impliquées dans sa création et son application ». L’Entente interdit toute dérivation hors bassin, sauf pour quelques exceptions très limitées. Une ville en dehors du bassin ne peut recevoir l’approbation d’une demande de dérivation qu’à partir du critère d’exception de l’Entente. De plus, la ville doit démontrer qu’elle a épuisé toutes les autres options raisonnables d’obtenir de l’eau. En d’autres mots, une dérivation est une mesure extrême de dernier recours. Que la ville de Waukesha soit autorisée à placer une demande sous la clause d’exception à l’interdiction de dérivation d’eau ne signifie pas pour autant qu’elle doit recevoir l’approbation d’aller de l’avant.

Une demande non justifiée

Même la ville de Waukesha n’arrive pas à justifier pourquoi elle a besoin d’un tel volume d’eau additionnel comparé à celui utilisé présentement ; l’Entente est pourtant très précise à ce sujet : le besoin en eau dans la communauté doit être réel afin de démontrer l’éligibilité de la communauté à un projet de dérivation d’eau des Grands Lacs. De plus, la ville propose de dériver l’eau du lac Michigan vers des municipalités, comme Delafield, qui n’en éprouvent pas le besoin et n’en ont pas fait la demande. Avoir inclus ces communautés dans le formulaire de demande de la ville de Waukesha n’est pas conforme à l’esprit de l’Entente.

Ensuite, la ville de Waukesha ne semble pas considérer toutes les autres options raisonnables pour alimenter sa population en eau potable. D’autres solutions existent : en effet, un rapport de 2015, réalisé par deux firmes indépendantes d’ingénierie, démontre que la ville de Waukesha possède une source alternative d’approvisionnement en eau ; il s’agit d’une nappe d’eau souterraine régionale située dans le sud-est de l’État du Wisconsin, dont le niveau s’est stabilisé, voire rehaussé. Ainsi, Nature Québec demande respectueusement que le Bureau régional ainsi que le Conseil de l’Entente refusent la demande de la ville de Waukesha, considérant qu’elle n’est pas conforme au standard d’exception.

Risque de pollution au phosphore

Par ailleurs, la proposition de Waukesha concernant le « retour d’eau au bassin d’origine » (d’où serait effectuée la dérivation) provoque des inquiétudes. En effet, la ville de Waukesha propose de retourner l’eau dérivée dans le bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent en utilisant la « Root river ». Or, la rivière Root possède un niveau élevé de phosphore et est officiellement désignée comme étant « détériorée », en raison de la présence élevée de phosphore. Même si l’eau de retour de la ville de Waukesha était traitée, cette eau risquerait d’introduire davantage de pollution au phosphore dans une rivière déjà détériorée par cette pollution.

L’Entente : un outil de classe mondiale qui doit être respecté

L’Entente sur les ressources en eaux durables du bassin des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent est un outil de classe mondiale qui permet de répondre adéquatement aux différentes demandes et, dans ce cas-ci, à une demande d’exception à l’interdiction de dérivation. Les clauses de l’Entente tracent la voie et permettent de nourrir la confiance du public envers leurs élus et représentants pour un besoin aussi essentiel que d’assurer une eau potable de qualité et en quantité suffisante à l’intérieur de leur bassin. Par conséquent, les promoteurs qui désirent disposer de cette eau en dehors du bassin où elle coule doivent démontrer hors de tout doute que leur demande de dérivation hors bassin est vraiment une mesure extrême de dernier recours, ce qui n’est pas le cas pour Waukesha.

Pour Christian Simard, directeur général de Nature Québec, « en raison des impacts des changements climatiques, dont les effets se font déjà sentir sur la planète, ce n’est qu’une question de temps avant que le Bureau régional de l’Entente ne soit confronté à d’autres demandes d’exception de l’interdiction de dérivation ou d’exportation de l’eau du bassin, ce afin de combler un manque d’eau pour des centaines de milliers, sinon des millions de citoyens vivant hors bassin. D’ici là, il est de notre devoir de protéger la ressource eau du bassin des Grands Lacs et du Saint-Laurent et ne pas affaiblir cet outil de premier ordre de protection qu’est l’Entente. » Le pacte doit être respecté. Enfin, Nature Québec est prête à fournir son appui au gouvernement du Québec s’il décide, en tant que signataire de l’Entente, de s’opposer fermement à la proposition de prélèvement des eaux du lac Michigan par la municipalité de Waukesha.

Lire le mémoire >>>

 

Source : Nature Québec

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